Afin de lire cette chronique dans les meilleures dispositions, la rédaction vous invite à vous installer au chaud, dans votre fauteuil préféré ou au sol, sous un plaid ou une couverture, une boisson chaude et des collations sur une table d’appoint proche… Puis de vous laisser simplement bercer.
Car c’est comme si Joseph Stevens et sa bande de Peel Dream Magazine avaient composé Rose Main Reading Room dans un souci d’envelopper l’auditoire dans une masse cotonneuse et confortable de mélodies et de rythmes. C’est donc comme un coq en pâte que votre serviteur s’est laissé transporter par ce quatrième album de la formation californienne, déjà bien prometteuse ces dernières années.
En bon élève de la musique indie pop de ces trente dernières années, le groupe nous avait déjà convaincu avec ses mélodies pop et rock alternatif à la Pavement, notamment avec Modern Meta Physic (2018), dont le titre et l’ambiance sonore se rapprochent du Modern English Decoration (2018 également) des cousins britanniques d’Ulrika Spacek.
Aussi, deux albums plus tard, c’est sans surprise que l’on retrouve Peel Dream Magazine explorer une vague avant-pop et folk électronique faisant écho à leur voisin M. Chris Cohen. Joseph Stevens et ses compères Olivia Babuka Black et Ian Gibbs nous déroulent avec cet album un concentré de musique pop dans lequel on retrouve des sonorités proches de Yo La Tengo (I Wasn’t Made For War, Lie In The Gutter) ou encore de Sean O’Hagan et du Stereolab de la période Sound-Dust (2002) à Margerine Eclipse (2004) (Oblast, Wish You Well, Machine Repeating).
Le groupe s’aventure également vers des titres instrumentaux bien tenus et toujours dans la retenue (Gems and Minerals qui nous rappelle The Flaming Lips), et combine ces hymnes flottants à des rythmes programmés (Wood Paneling, Pt. 3), acoustiques et même motorik comme sur Migratory Patterns, qui aurait pu être une composition des français de Mermonte.
Mais alors, que retenir de cette copie sans faute du trio de Los Angeles ? Joseph Stevens aura certainement voulu proposer avec Rose Main Reading Room un espace mental apaisant, une sorte de bulle lumineuse, chaude et colorée, protectrice face à un monde dans l’escalade de la violence : le faussement doux Central Park West mentionne l’assassinat de John Lennon tandis que I Wasn’t Made For War ironise sur la guerre et la gloire.
Les titres des chansons ainsi que leurs paroles semblent donc évoquer un tiraillement du frontman, entre rejet de la fatalité et fuite vers un avenir (ou un rêve ?) lointain. Ainsi Olivia Babuka Black chante sur Lie In The Gutter : “The world is defeating, but I’m busy reading the patterns, the constellation” ("Le monde s’écroule, mais je suis plus occupée à lire les motifs et la constellation”).
Gageons donc qu’avec ce nouvel album, Peel Dream Magazine aura réussi sa mission : celle de consoler votre enfant intérieur des tourments et inquiétudes d’un monde trop adulte, et rêver encore et encore de réalités alternatives et de paysages merveilleux.