Figure majeure de ce que l'on appelle assez largement le drone ambient, Lawrence English est déjà l'auteur de nombreux joyaux du genre et poursuit ici le travail entamé avec son prédécesseur Wilderness of Mirrors. En effet ce nouvel album continue, à l'image de cette pochette ténébreuse, de percer une couche nuageuse opaque à grands coups de vrombissements dantesques et de sonorités d'une noirceur sépulcrale. L'australien s'est d'ailleurs savamment entouré, conviant à sa messe noire quelques pointures telles Thor Harris et Norman Westberg, respectivement percussionniste et guitariste des Swans, le pianiste de The Necks Chris Abrahams ou encore Mats Gustafson, saxophoniste collaborant souvent avec la scène noise (Sonic Youth). Ces membres émérites seront cependant difficilement distingables au sein de la production massive de Lawrence English, ils sont quasiment noyés dans ce nouveau projet s'apparentant à un trou noir absorbant toutes lumières ou matières environnantes.
Cruel Optimism est un gouffre géant dans lequel une nature hostile reprend ses droits et laisse échapper des vents violents au souffle corrosif. En résulte un album drone ayant au-delà de ça un sens de l'orchestration flirtant parfois avec une forme de symphonisme balourd comme en témoigne les coups de massue que sont Hammering a Screw et Object of Projection. Si ces grands terrasements de la matière sonore font toujours leur effet, ce sont paradoxalement les accalmies de l'album qui emportent certainement le plus l'adhésion, laissant l'auditeur dans l'attente insoutenable de l'apocalypse ou dans l'espoir d'un échappatoire qui peine à exister. Cet équilibre du calme avant la tempête et de cet état en suspension prend peut-être son sens premier dans l'oxymore du titre de l'album. Si l'optimisme est si cruel, qu'en dire alors du pessimisme ? Qu'en déduire des obscures névroses de l'australien et de la musique qu'elles lui inspirent ? Cruel Optimism ne tentera pas d'y répondre mais continuera d'exercer son pouvoir de fascination. Une fois encore, Lawrence English sait magistralement donner une voix au cyclone, mais c'est toujours au plus près de son œil qu'il devient sinon dérangeant du moins intriguant.
Chroniqué par
Romain
le 20/08/2017
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