A la première écoute de
The Last Resort, il me prend une irrésistible envie d’écrire et de décrire le pourquoi du comment
Take me into your skin me rentre par tous les pores de la peau… Une basse profonde et quelques nappes de synthé qui rappellent les brumes de
Sigur ros et les montagnes enneigées de
Björk, enfin par-dessus, une montée progressive, irrésistible, à vous exploser le dance-floor … De la glace en fusion, en somme. Autre morceau évocateur de cette musique polaire,
While the cold winter waiting porte son nom à merveille. Le rythme est plus lent, dessinant un paysage se laissant progressivement engourdir par le froid de l’hiver. Une basse cardiaque et profonde figure la sève endormie, qui survit à cet enneigement. En tous cas, nous, on a déjà fondu !
Mais le sieur fait aussi dans la finesse du détail. Il manie les clicks et les déflagrations électriques aussi bien que les grandes mélodies romantiques. Et flirte avec le registre des musiques de film, comme sur
Like two strangers, où quelques notes de xylophone précèdent une symphonie de riffs de guitares façon western, de gimmicks de bruits de portes et de voix à peine dévoilées. De véritables voix, vous en entendrez peut-être aussi - celles de Richard Davis et d'Anne Trolle- sur les versions remaniées de
Always something better et de
Moan, si vous vous procurez le CD bonus (CD qui présente aussi l'intérêt de compiler d'ancien singles).
Une certaine tristesse se dégage au final de l’album, comme sur
Miss you, tranche de mélancolie taillée à vif sur le flot du temps. On pense à la douceur de
Mum, un groupe de nordiques, également... D'autres titres au contraire sont dans la plus pure lignée de la dance minimale allemande, comme
Into the threes, qui donne sa tierce partie au track
Serenetti, paru en 2006 sur Tic tac toe, le label danois.
Vamp, une espèce de booty-blues à la dégaine terrible, laisse deviner l’influence revendiquée des
Daft Punk (mais on pourrait aussi se référer à
Justice, notamment pour le côté électro-rock cradingue..). Une belle brochette d’inspirations, en somme.
Reward, on reprend depuis le début :
Trentemoeller débarque sur la scène musicale en 1997, avec son groupe Trigbag. Ils jouent en live, avec un batteur et un bassiste. En 2000 l’aventure s’achève, et il s'essaie alors à tout : breakbeat, jazz, rock… Ces influences musicales se ressentent dans The Last Resort, qui fleure bon le dub (Nightwalker, Evil Dub), le rock, et même l’ambiant. Une fois ses premières amours électroniques retrouvées, c’est grâce à la rencontre avec l’excellent artiste et producteur Steve Bug que la carrière du danois va prendre toute son ampleur, en même temps qu’il rentre dans l’écurie Poker Flat. Mais à l’époque, le son que nous révèle Trentemoller est bien loin de ce qu’il nous laisse paraître aujourd’hui : les titres étaient plus rapides, plus dance, voire techno (Rykketid, sur le maxi Physical fraction). Trentemoller est aussi le grand manitou remixeur d’une floppée de groupes comme The Knife, Röyksopp, les Pet Shop Boys ou Moby.
The Last Resort est donc une espèce d’œuf Kinder, on croit y trouver un fleuron dance, quand on tombe en fait sur une perle glacée. Le plus étonnant, c’est que les titres s’enchaînent et se répondent avec une réelle cohérence d’ensemble -chose plutôt rare pour un premier album. Sans doute est-ce l’effet de ces nappes atmosphériques, sortes de présences fantômes, de boussoles temporelles tapies dans l’ombre de la conscience, qui forment la trame de motifs divers et variés. Le prochain sera, paraît-il, enregistré avec une chanteuse danoise, dans un style plus électronica. Chouette, encore une surprise !
>Wikipedia: un article sur Trentemoller
Chroniqué par
Ether
le 30/11/2006