Shara Worden a sorti fin août sous le patronyme My Brightest Diamond, son premier album sur le label de son ami Sufjan Stevens, Asthmatic Kitty.
Fille d’un pasteur et d’une organiste de messe, Shara a bénéficié dès son enfance d’un apprentissage solide de la musique classique (cours de piano, chorale puis conservatoire), mais c’est la musique pop, découverte dans les clubs indés new-yorkais, qu’elle choisit d’explorer sur ce premier album à la fois chargé de l’électricité des guitares et organique.
Les attachés de presse évoquent certes de façon un peu zélée une rencontre entre la pop et l’opéra, (la jeune femme a failli embrasser cette carrière). On dira simplement que c’est bien la superbe voix de la jeune femme qui constitue le fil conducteur d’un disque climatique au lyrisme ombrageux. De cette voix ensorcelante, portée par une technique vocale totalement maîrisée, Shara Worden joue dès le premier morceau, le baroque something of an end. Son chant, sur la longueur de l’album, embrasse divers états, se contenant dans un fragile frémissement de sons au bord de la disparition (We Were Sparkling) ou gravissant les octaves pour subitement exploser en vol (Golden Star). Pourtant, Bring me the workhorse ne s’égare à aucun moment dans une théâtralité complaisante, même si quelques (rares) envolées vocales risquent à la première écoute d’en surprendre quelques uns. Il faut passer outre, car la jeune femme ressaisit à travers une syntaxe narrative et harmonique d’une réelle finesse, la chair poétique parfois lugubre de ses évocations qui puisent autant dans les fantasmagories étranges des souvenirs d’enfance (the robin’s jar, magic rabbit) que dans l’expérience urgente du désir ou de la séparation.
Les arrangements magnifiques du disque (cordes, percussions), sont plus qu’un écrin pour le chant. Les instruments et la voix dialoguent ensemble tout au long du disque avec une rare expressivité, sans lourdeur, comme deux souffles mêlés qui formeraient la respiration unique d’un disque aéré autant qu’aérien, brûlant et glacé à la fois, et dont l’aura n’est pas près de se ternir.
A noter : une session live de Shara Worden enregistrée le 14 juin 2006 est à télécharger gratuitement ici :
Chroniqué par
Imogen
le 16/11/2006