"Le rock français c'est comme le vin anglais" ironisait John Lennon dans les années 70, et le rock belge dans tout ça ? Il y a vingt ans sortait The Ideal Crash de dEUS, troisième opus du groupe composé après le départ d'un de leurs membres fondateurs Stef Kamil Carlens (parti fonder Zita Swoon) et surtout classique instantané de pop-rock n'ayant à rougir d'aucune concurrence anglo saxxone. dEUS s'éloigne ici des expérimentations génialement foutraques de leurs débuts lo-fi pour atteindre un bel équilibre entre efficacité calibrée FM et sophistication indie, insufflant dans ces dix nouvelles chansons une finesse d'écriture donnant à chacune d'entre elles la forme de petits rollercoasters non seulement soniques mais aussi émotionnels.
Dream Sequence #1, Magdalena, Sister Dew, The Magic Hour... autant de morceaux à tiroirs avoisinant les 5-6 minutes et offrant, au-delà de leurs mélodies imparables et de leurs arrangements aux petits oignons, une palette d'humeurs changeantes, de reliefs cabossés et de constructions labyrinthiques loin des schémas verse/chorus/verse, puisant autant dans la pop mielleuse que dans le rock noisy. Les dissonnances d'Instant Street (ci-dessous) évoquent même celles d'un Robert Fripp qui serait venu parasiter une pop-song parfaite et enclencher le mode essorage. The Ideal Crash referme admirablement la décennie 1990 du rock aternatif dans un geste quasi indémodable (la suivante sera largement consacrée aux revivals de toutes sortes) et reste un must diablement efficace.