Première sortie du tout neuf label lillois Cabaret Walter,
Un cadavre exquis se présente comme un projet original, mélangeant les styles musicaux et les horizons géographiques, grâce à la dizaine d’artistes qui le composent. Construit sur le modèle des « cadavres exquis » dadaïstes (puis surréalistes) – petit jeu consistant à la création d’un texte à plusieurs mains et à l’aveugle, sans avoir réellement connaissance des travaux de celui qui précède – cette compilation adapte la formule à la création musicale. Ainsi, chaque artiste a eu connaissance du morceau de son prédécesseur et avait pour consigne de donner naissance à un titre de 3 à 5 minutes, se terminant sur une boucle d’un ou deux instruments, offerte pour celui qui lui succéderait.
Le risque de ce genre de projet aurait pu être l’artificialité de la formule, où la forme primerait sur le fond. Mais, grâce au talent et au travail des musiciens présents, cet écueil est parfaitement évité. Les morceaux s’enchaînent selon diverses techniques autour de la boucle finale : chanson construite sur ce modèle, samples qui viennent rappeler ce qui précède, superposition d’une nouvelle mélodie qui crée une variation autour de la boucle. Le tout obtenu s’écoute d’une traite, sans véritablement savoir où finit un titre et quand commence le suivant. Certes, les frontières apparaissent parfois, selon la texture du son, mais ce détail est tout à l’honneur des instigateurs du projet, permettant d’éviter un trop grand lissage musical, en conservant les aspérités et les particularités propres à chacun.
Quant à la liste des musiciens conviés, elle est plus que séduisante. Mêlant à merveille artistes confirmés et découvertes, elle pioche aussi bien dans les territoires rock que folk, ou encore jazz. On y retrouve ainsi
Dominique A, pour un morceau intimiste et déconstruit, les Australiens de
Dirty Three (projet de
Warren Ellis, violoniste de
Nick Cave), avec un titre planant et lancinant dont ils ont le secret, ou encore l’ex-
dEUS Rudy Trouvé, pour une ballade entre folk et electronica. Les groupes
Venus et
Black Heart Procession apportent eux-aussi leur savoir-faire, offrant chacun une piste dans laquelle leur pop subtile vient se frotter aux directions offertes en cours d’album. Enfin, aux côtés de ces noms déjà entendus, on découvre plusieurs musiciens moins connus, tout aussi à leur affaire. Le duo
AmorBelhomduo apparaît ainsi comme divorcé, chacun amenant une composition pour le projet (mention à la ritournelle tubesque et ensoleillée créée par
Naïm Amor). Le jazzman belge
Peter Vermeersch déboule lui avec un jouissif et délirant morceau d’electro-jazz, faisant la part belle à sa clarinette. N’oublions pas encore de citer
L’ouvreuse (au nom bien choisi), qui avait la difficile tâche d’offrir le point de démarrage (et d’ancrage) de l’album, ainsi que le duo
Guilhem Granier et
Guillaume Beauron (tous deux ex-
Madrid), proposant une étrange comptine teintée de réminiscences post-rock.
Au final,
Un cadavre exquis est un projet qui tient toutes ses promesses. Jonglant habilement entre les genres, il permet à la fois de lancer des ponts entre les artistes et de déborder de secs virages, qui rendent son écoute captivante. Une réussite pour ce premier essai d’un jeune label prometteur.
Chroniqué par
Christophe
le 05/07/2005
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