Pour la compilation
Je suis un étranger, le label Ronda imposait aux participants de composer à partir de samples d'un langage étranger (du polonais jusqu'au néerlandais). Pour autant, on ne vous fera pas passer ce disque pour un manifeste "transglobal" ou une preuve d'un postulat du type "la musique est sans frontières". Non, parlons simplement musique.
Parlons de la très jolie
Nouka, de
Mils, qui fait s'envoler boîtes à musiques et saturations aimables dans un final qu'aurait pu signer
dDamage (cf. leur
aeroplanes sur
Radio Ape) ; parlons de ces
dD-ci, qui préfèrent jouer aux idiots avec
ich verstehe nicht dans un déjantage en toute gay-té. Parlons du groupe
Transbeauce, qui cultive lui aussi un heureux décalage, jouant de synthés surannés et d'une rythmique retro (
sven).
Parlons de musiques plus obscures, quand
Lucky.R expérimente et grince façon lo-fi ; quand
aka_bondage nous hypnotise par ses cycles ambient étranges. Et parlons du dialogue mis en scène par
sun.plexussur fond de guitares irisées, avec en guise de leitmotiv, une sonnerie téléphonique crispante. Il faut aussi évoquer
tumbleweed, de
Silencio, où cette même tension électrique de fond laisse surgir quelques notes tendres, pianotées, et des paroles mal discernables. Tandis que
dscl, lui, aligne impassiblement toutes les options de questions et de plaintes balisées et ennuyantes qu'offre la vie quotidienne, dites par une femme sur un mode monocorde, sur le justement nommé
mais faites la taire. Sur son morceau, les "Je reviendrai plus tard" ; "combien cela coûte-t-il de l'heure ?" ; "que vous est-il arrivé ?" ; "j'ai perdu ma clé", s'enchaînent et éprouvent la résistance de l'auditeur ; là où la plupart des autres artistes semblent utiliser les samples comme un matériel sonore un peu anodin, ce discours intelligible (qui apporte un sens, parce qu'en français, avant tout), est porté consciemment jusqu'à l'insupportable.
Salutairement, c'est
Xerak (croisé chez Ekler'O'Shok) qui assure le relais. Au bout de deux minutes, il vire d'un bord instrumental hip-hop monotone pour retrouver la touche de sampler shaker et le groove ludique qu'on lui reconnaît. A la suite,
Ch.District et
depatie sont des exemples de producteurs qui, sans faire preuve d'une originalité particulière (chacun dans leur registre : click'n cut / post-rock), font preuve de sensibilité. Pour un
Do shaskal qui choisit d'accorder sa musique à la langue arabe, qui chaloupe des tablas et nous entraîne dans ses cordes orientales, un
Bleetch nous gratifie de quatre minutes climatiques et complètement envoûtantes. On s'y était tout à fait oublié, quand les clicks de
seb.R nous ont repris en main, et mené vers le morceau final de
hypo & musicometre. Une pop song néérlandaise désarmante dans le charme que dégagent ses désaccords troubles.
Si la moindre des qualités de la plupart des artistes ici réunis est d'avoir eu des choses à dire, une sensibilité à transmettre, avec bien sûr la musique pour langage, l'intérêt réel de cette compilation est à chercher dans les quelques uns qui ont su nous réjouir en tirant partie de l'exercice de style proposé : ceux qui ont su créer un exotisme dérangé à partir de ces paroles étrangères.
Chroniqué par
Guillaume
le 14/03/2005
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