Six Organs of Admittance de passage à Paris, ça se fête, d’autant plus que notre ami Ben Chasny se produit dans une configuration inédite en France : un batteur et trois guitares. De quoi d’emblée orienter le débat du côté de la saignée de tympans.
Tout d’abord direction vers l’espace B, amis parisiens ce lieu vous rappellera bon nombre de plans foireux dignes du trop célèbre
Gambetta, et tout particulièrement pour les musiciens qui ont eu la joie de s’y produire dans des conditions catastrophiques : patron pas sympa, lieu sans âme digne des relais routiers les plus miteux, programmation inexistante, ingénieur du son qui fait payer un enregistrement imaginaire... Bref, l’un des hauts lieux des nuits parisiennes foireuses qu’il fallait éviter absolument.
Et bien depuis septembre dernier les choses ont radicalement changées. Repris par l’équipe qui organise le festival
Top Of The Folk à Rennes, l’espace B devient
La Compagnie Générale de Rock
et propose une programmation des plus intéressantes dans un lieu qui a de l'allure et qui donne envie d’aller plus souvent balader ses oreilles du côté de la Porte de la Villette. Une programmation irréprochable qui marie valeur sûre et nouvelles gardes de la scène indépendante : entre rock, folk et électro. Organisée par le collectif
C.L.E.A.R, le concert de
Six Organs Of Admittance inaugure une nouvelle série de concerts intitulés
Fisheye Show, qu’on vous recommande chaudement.
Après avoir ouvert le bal avec leur vision électro rock du
tropicalisme, les portugais de
Gala Drop cèdent la place au guitariste qui nous avait régalé avec son dernier album
Luminous Night. Au programme, des titres de son dernier album, mais aussi un condensé de ses précédentes productions
School Of The Flower,
Shelter From The Ash et bien d’autres. Un concert court, à peine une heure, dans lequel
Six Organs of Admittance enchaîne les titres sans temps morts. On est déjà conquis à l’avance par le bonhomme et ce début de concert confirme que la soirée se déroulera sous les meilleurs auspices. On en prend plein les oreilles surtout quand la guitare d’Elisa Ambroglio fait irruption pour donner la dose de folie qui achèvera l’auditoire. Une guitare incisive dont le volume élevé surpasse le reste des instruments afin d’asséner le coup de grâce. Dans le registre psychédélique, on songe à
Acid Mothers Temple par la brutalité de cette incursion, mais aussi par l’importance de cette intervention qui donne toute sa force à ces longues plages musicales ponctuée par la voix de Ben Chasny et de ses acolytes. Dans cette configuration, la batterie apporte une réelle ponctuation aux longs
trip hallucinés du groupe. Mais à force de vouloir donner une part de folie à ses interprétations le batteur en oublie ses collègues. Un jeu qui devient brouillon et bavard au point de se demander si cela n’a pas été fait exprès. On ne le se saura jamais, mais cela a réussi à séparer une partie de l’auditoire entre ceux qui ont adoré ce concert par le côté brouillon de la rythmique et ceux qui, au contraire, se seraient bien cotisés pour offrir des cours de batterie à l’intéressé. Un autre bémol, on regrette que Ben Chasny n’ait pas troqué de temps à autre sa
telecaster au profit de sa guitare folk, car ce dernier excelle par la finesse et l’expressivité de son jeu sur cet instrument. Malgré ces quelques (minuscules) réserves, on reste marqué par cette opposition entre la sobriété des musiciens et les moments de folie dans lesquels ces derniers finissent par nous emporter. En effet, avec
Six Organs of Admittance, les concerts sont à l’image des albums : un long trip mystique qui, s’il ne provoque pas une réaction spasmodique de la part de son auditoire, suscite un véritable sentiment de jubilation intérieure.