Samadhisound, le label de
David Sylvian, nous dévoile un objet musical tout à fait inattendu :
Uncommon Deities. Les artistes norvégiens et curateurs du Punkt Festival
Jan Bang et
Erik Honoré y donnent une relecture de deux installations, sorte de work in progress, créées à l'origine par
David Sylvian et à laquelle ont participé les improvisateurs et électroniciens de génie
Philip Jeck,
John Tillbury et
Dai Fujikura ainsi qu'un ensemble de musique contemporaine.
Uncommon Deities n'est donc pas une documentation des installations de
Sylvian mais bien une pièce inédite, une recombinaison de
Jan Bang et
Erik Honoré accompagnés ici de la chanteuse
Sidsel Endresen, proche d'
ECM, de
Nils Petter Molvær, et du trompettiste
Arve Henriksen, tous deux également originaires de la Norvège. Le résultat c'est une pièce extraordinaire, une envoûtante symphonie jazz expérimentale en forme de cadavre exquis surréaliste où de multiples strates sonores se font échos.
Une construction très contemporaine faite de piano et de trompettes vaporeuses accompagnent la lecture par
David Sylvian des oeuvres des poètes
Paal-Helge Haugen,
Nils Christian Moe-Repstad et
Evan Parker.
Sidsel Endresen lui donne la réplique avec une voix syllabique et jazzy tandis que
Jan Bang et
Erik Honoré accompagnés par le souffle d'
Arve Henriksen esquissent une toile sonore impressionniste et enveloppante. Servi par les interventions minimalistes des musiciens, le duo de voix entame une danse irréelle. Parfois, un accordéon timide s'invite au coeur de cette valse ralentie et aérienne (
The god of smaller gods). Ou bien un djembé suggère un mouvement fantomatique (
The god of small caresses). Le tout est microscopiquement saupoudré d'effets électroniques. Les enregistrements sont directs : sorte d'instantanés libres et magiques, fruits d'improvisations aussi fertiles qu'inattendues.
A cheval entre l'oeuvre radiophonique, la musique classique contemporaine et la musique improvisée,
Uncommon Deities est une séduisante épopée moderne et envoûtante qui tente de tracer un arc entre les expériences collectives du controversé
Manafon et les fulgurances expérimentales du chef d'oeuvre de
David Sylvian,
Blemish. Il résulte une œuvre blanche, un mariage délicieux avec le silence qui continue de tracer les contours d'une pop audacieuse et iconoclaste dont le label
Samadhisound demeure la tête de pont.
Chroniqué par
Charlu
le 14/12/2012