Il est des virages popeux que l'on appréhende. La liste des producteurs s'essayant au chant ne cesse de s'allonger, et avec elle celle de nos artistes chéris perdant le crédit acquis des premières années. Quand on annonce ce deuxième album d'
Exile comme le chaînon manquant entre
Aphex Twin et
Depeche Mode, forcément, cela invite à la méfiance.
Tim Exile est d'abord un bidouilleur hors-pair. Il fabrique ses propres machines à son à partir de Reaktor. Ses connaissances en la matière lui valent régulièrement de travailler pour Native Instrument. Mais le mieux pour se rendre compte de son talent, c'est encore d'écouter son live
Tim Exile's Nuisance Gabbaret Lounge.
Tim ne se contente pas de mixer. Il construit ses morceaux en direct, samplant une syllabe lâchée dans le micro pour la transformer en gimmick. L'heure où le britannique enflammait les dancefloor londoniens de sa drum'n'bass survoltée est pourtant passée. Après s'être fait remarqué pour l'excellent
Pro Agonist chez
Planet Mu, c'est de la maison
Warp que sort sa nouvelle galette.
Listening Tree, image non sans rapport avec l'importance qu'attache l'artiste aux questions environnementales, se démarque beaucoup de ses premiers travaux. Le rapprochement avec
Aphex Twin ou
Depeche Mode est-il justifié ? Pas vraiment. Elle vaut juste pour les textures utilisées. Effectivement, on retrouve un peu du groove de
Windowlicker dans
Pay Tomorrow. Quant à
Depeche Mode, comprenons que
Tim Exile utilise pour sa voix des effets pouvant rappeler ceux qui étaient d'usage en new wave (le delay sur
Don't Think We're One en est le parfait exemple). Le résultat est mitigé. Pour
Pay Tomorrow, le chant apporte ce qu'il manquait au titre pour devenir le tube en puissance. Sur d'autres, le mélange est moins heureux, la mélodie moins accrocheuse, quand le flow ne manque tout simplement pas d'inspiration, trop attaché qu'il est à marquer les temps.
C'est donc à un nouveau
Exile que nous avons affaire. Un
Exile qui prend le micro, mais sans abandonner pour autant ses machines à déstructurer le son avec lesquelles il se montre si habile. Au fond, le britannique s'est toujours amusé avec sa voix. Quoi de plus logique qu'il en vienne au chant ? Gageons que cet essai l'ouvre à un public à la sensibilité toute autre que celui qu'il conquit avec
Pro Agonist. Une bonne chose, sûrement, mais le titre
When Every Day's A Number ne peut m'empêcher de regretter cette période où le britannique proposait une drum'n'bass tout à fait novatrice.
Chroniqué par
Tehanor
le 05/02/2009