Sombres ruelles, vives querelles ou conflits perpétuels. L’atmosphère de
Radio Blood Money transpire le contentieux mafieux, chaque goutte de sueur évoquant un stéréotype du crime organisé. Violence, corruption, poker, drogue, prostitution, règlement de compte... Etonnant ? Pas vraiment.
Le Peuple de l’Herbe s’est inspiré du sombre roman de science fiction
Dr. Bloodmoney de l’Américain
Philippe K. Dick.
Publié en 1965, au milieu d’une époque communément appelée Guerre Froide, le roman fait la nique au président Nixon, mettant notamment en scène un opposant au pouvoir dont la seule arme est une radio.
Le Peuple replace cet écrit dans l'actualité. Ce quatrième album surprendra l’auditeur, habitué aux rythmes festifs des Lyonnais. Moins de sampling et plus de musique live, prête à prendre son envol sur scène. Peu voire pas de couleurs, ni même un rayon de soleil. L’album semble avoir été enregistré sur les quais d’un terminal industriel. La variation des tons de gris, du noir et du blanc suffisent.
Sir Jean tente veinement d’égayer l’album en imposant son riddim sur
Judge Not, mais le chanteur sénégalais (ex
Meï Teï Shô) doit se raviser, vite rafraîchit par une instru glaciale et encore une fois… industrielle. Le très bon
Riddim Collision, rythmé par un synthé à la sauce
Zenzile, illustre un album mélangeant les saveurs, multipliant les parfums, mais maintient l’ingrédient indispensable de la recette du
Peuple de l’Herbe, la trompette.
« Une nation de non-fumeurs. Pas de cigarette, pas d’alcool, pas de drogue, pas de femme. A moins bien sûr d’être marié. » (Extrait de
Traces) Comme dans l’ouvrage, le groupe s’engage politiquement contre un gouvernement répressif, milite avec les mots, pointe du doigt les entraves à la liberté en adaptant l’œuvre des années 60 à l’époque actuelle. Les rebelles lyonnais ne voient sûrement pas d’un bon œil (sans vouloir leur faire dire ce qu’ils ne revendiquent pas ouvertement) la présidence qui les gouverne. Qui nous gouverne...
Un engagement qui semble amorcer la révolution tout en douceur du Peuple, qui abandonne peu à peu son étiquette de machine à sampler. Le résultat est agréable mais manque d’homogénéité. Paradoxe, ce grand bazar illustre parfaitement l'ambiance du crime organisé, comme sorti d’un hangar désaffecté.
Le Peuple de l’Herbe amorce sa révolution… industrielle.
Chroniqué par
Camille
le 05/11/2007