En 2004, le festival « Ai confini tra Sardegna e Jazz » s’intéressait particulièrement à l’œuvre d’
Eric Dolphy (disparu 40 ans plus tôt). Pour l’occasion, colloques et concerts étaient organisés, qui revenaient sur l’homme, son œuvre, son influence. Publié en 2005,
Tender Warrior rassemble un livre et un disque, pose les scellés et fait figure de résumé.
Quand le livre revient sur les effets de la carrière du clarinettiste, saxophoniste et flûtiste, sur le jazz et les musiques improvisées, interroge à son propos une pléiade de musiciens (tels que
Joe McPhee,
Jef Sicard,
Ken Vandermark,
Otomo Yoshihide), donne à lire sa dernière interview et retranscrit la discographie du maître élaborée par ses biographes Vladimir Simosko et Barry Tepperman, le disque offre une sélection des concerts donnés cette année là à Santa’Anna Arresi.
Pêchant ici dans le répertoire de
Dolphy, improvisant là, les musiciens rendent des hommages différents. Des polyphonies étranges du launedda accompagnées par les tablas et darboukas (pour le résultat approximatif de
Red Planet de
Coltrane on Launeddas, enchaînant leurs solos plus que naïvement) à l’interprétation par l’
Eric Dolphy’s Memorial Barbecue d’
Out to Lunch et
Out There sur le mode brouillon, en passant par le duo
Tim Berne (saxophone) /
Umberto Petrin (piano) au contemporain pompier, l’auditeur avait de quoi craindre le pire.
Heureusement,
Nexus, formation locale plutôt en verve, enchaîne une composition personnelle et la
Jitterbug Waltz, passant d’un free radical à une impression atmosphérique, pour rendre ensuite avec les honneurs
245 et
Lotsa Potsa. Le duo
Matthew Shipp /
David S. Ware, ensuite, improvisant
Two for Eric, combinant leurs improvisations individuelles, toutes à l’écoute de l’inspiration. Courte, l’improvisation ramasse assez d’évidences pour excuser les faux pas pratiqués ailleurs sur le disque.
En guise de conclusion, un extrait d’un des derniers concerts de
Dolphy. En compagnie du
Bob James Trio, le 1er mars 1964,
Dolphy passe d’un instrument à l’autre sur la partition déposée par ses accompagnateurs. Dissonant, stimulant et dense,
Strenght And Unity dévoile sans doute ce qu’aurait pu être sa musique par la suite : plus étrange, forcément ; plus inédite encore.
Chroniqué par
Grisli
le 22/05/2006