Le danger quand on produit une musique crossover, c’est d’abandonner la recherche pour la tradition, la relecture et la réécriture. C’est le cas du dernier album de
Peven Everett, mais c’est aussi ce à quoi il tente d’échapper, avec plus ou moins de succès.
Pratiquant une soul soyeuse et douce, influencée par
Prince (un même usage des claps), par le jazz électrique années 70 et le funk, par une attention aux harmonies vocales et à l’euphonie,
Peven Everett développe son répertoire de love songs et de morceaux nocturnes avec sensualité, assurance et une science certaine des arrangements léchés (les percussions et les cordes de
Beep You, par exemple). Brassant en une même composition gospel, hip-hop, sonorités latines, funk et soul, il semble se perdre un peu dans tout cet héritage musical et a à cœur de tout réassembler plus que de tout réinventer, comme le fait par exemple
Jamie Lidell.
Impasse qu’il aperçoit pourtant, quand il épure la production de
See Saw ou de
Get What You Got pour des boucles sautillantes et chilly, quand il désarticule le rythme en une pulsation digitale accompagnée d’un spoken word sur
Do You Love Me, quand il s’essaie au
field recording sur
Street Walker, trouvant dans le son une substance cinématographique qui rejoint la mélancolie des polars crépusculaires des seventies. Des tentatives dont l’audace aurait gagné à être exploitée plus systématiquement et de manière plus approfondie et qui aurait donné un surcroît de vitalité à ce disque en demi-teinte.
Chroniqué par
Mathias
le 31/03/2006