Sorti en 2007, l’album
Il ne peut y avoir de prédiction sans avenir, signé par le groupe grenoblois
RIEN est sans aucun doute l’un des derniers grands chefs-d’œuvre de ces cinq dernières années. De quoi rivaliser avec les groupes qui ont révolutionné le genre.
Après avoir proposé un prometteur
Requiem pour les baroqueux en 2003, le groupe, formé en 1999 par quatre membres au noms dadaïstes (
aka, dos.3, Dj Goulag et yugo solo), avait déjà annoncé le programme des festivités en signant un O.V.N.I. qui associait déjà l’univers d’
Ennio Morricone, de
Serge Gainsbourg, Radiohead et bien d’autres. Avec ce second opus, le groupe s’est véritablement surpassé, en proposant un post-rock inclassable réalisé avec l’aide de nombreux contributeurs, dont le poète
Julien Brote, Damon Locks (
The Eternals) et
Appolline, au chant. De quoi offrir une expérience assez unique, à l’auditeur habitué à errer dans ce genre musical.
Si le groupe était déjà connu pour ses inspirations épiques et chamaniques, nul doute que l’on restera pantois à l’écoute de cet album, tant on s’enfonce dans un rêverie onirique des plus étranges.
RIEN offre un album qui s’écoute comme une œuvre cinématographique marquée par un générique de début et de fin, qui s’avère être une généralissime trouvaille. Le tout est alimenté par les cuivres, les percussions, les divers bruitages et surtout la voix sous ses formes les plus variées : le
spoken word (
Dieu du Seigneur), la poésie (
Se Repulen), le chant extraverti (
B.A.S.I.C.), les extraits de film (
Il ne peut y avoir de prédiction sans avenir ) et les chœurs féminins dignes des B.O.F. des films de genre des années 50 à 70 (
Partie de Chasse à Deauville, Se Repulen, etc.). Le groupe n’oublie pas de fournir un jubilatoire travail sur la musique, en proposant un univers hypnotique et ce, grâce la contribution apportée par la basse et la batterie (
This is Our Grunge). L’ambiance sombre à la plastique irréprochable est à l’image du film de
Charles Laugton La nuit du chasseur avec
Robert Mitchum, dont l’un des monologues est repris dans le titre
Il ne peut y avoir de prédiction sans avenir. Passé maître dans l’art de poser des ambiances oniriques, le groupe n’oublie pas de rappeler qu’il sait tout aussi bien être fougueux. Le spectre d’un
Franck Zappa n’est jamais loin, tant dans les
soli de guitares (
Se Repulen), que dans le titre
B.A.S.I.C., véritable tube d’inspiration seventies, que le leader de
The Mother of Invention, n’aurait pas renié. Bien sûr, l’univers de l’album
Mélodie Nelson de
Serge Gainsbourg n’est pas loin. La guitare œuvrant sur le titre
Humpty Dumpty was Pushed en est la preuve la plus flagrante. Concept album,
Il ne peut y avoir de prédiction sans avenir n’en est pas moins varié, le groupe n’hésitant pas à glisser tant vers les marches aux accents
noise (
Cortez) que vers le folk déglingué (
Cowboys Don't Cry) en passant par un déluge aux rythmes lourds qui donne une sensation de folie dadaïste (
L.S.D. - Loisirs Sport Detente).
En proposant un album épique aux ambiances entêtantes,
RIEN signe l’un des plus grands albums de cette décennie. Cette formation a apporté à ce genre musical, victime de nombreuses redondances, une véritable bouffée d’oxygène. Et quand on apprend que le groupe va sortir un nouvel album courant 2009, fin 2010, eh bien on prend son mal en patience, en allant les applaudir lors de leur prochaine tournée qui débutera au mois d’avril prochain.
Loin des circuits de distribution habituels, le groupe propose directement son album à la vente sur le site de son label (
l’Amicale Underground). La version physique de ce dernier étant épuisée, vous pouvez vous consoler en allant le télécharger gratuitement sur ce site et en faisant un don pour soutenir la production de leur futur album.