Jouer d’une douzaine d’instruments aide sûrement à s’attaquer seul à l’enregistrement d’un album. Ainsi, 
Laurent Rochelle, saxophoniste jamais inquiété à l’idée de déserter le cadre d’un instrument unique, posait en 2003 dix compositions en guise de 
Conversations à voix basse. 
De ce que le re-recording permet à tout un chacun – soit, insuffler à un enregistrement l’intervention d’une infinité possible de Moi -, 
Rochelle a su ne pas abuser. Tissant quelques fonds répétitifs au son d’une clarinette basse rappelant 
Louis Sclavis ou le 
Portal de 
Burundi (
Pink City, 
C’était janvier), commandant l’invasion de l’espace à quelques samples faits décorums (
Samplétudes), le musicien attise ensuite le propos par des progressions raffinées de soprano ou de flûte bancale. 
Les tentations free (
Sur le fil) côtoient une valse que dépose un piano, bientôt avalé tout entier par la véhémence de quelques programmations (
Diagonales). Les impacts de clefs d’un instrument à vent fantasment une cavalcade rangée sur 
Le cheval rouge, au thème bientôt étiré par 
Cold Water Buffalos, rodéo intense tissé d’entrelacs de clarinettes sur lesquels court un mélodica. 
Moins convaincant lorsqu’il se laisse aller à des penchants tierseniens – mélodie sentimentaliste de 
Petits pas perdus, apte quand même à l’appogiature, et piano d’une naïveté roborative d’une 
Chanson pour l’hiver qui vient -, 
Rochelle s’en tire avec les honneurs lorsqu’il fait confiance à d’autres influences. Celle de 
Satie, par exemple, qui n’aurait sans doute pas renié l’amusante voix de fausset doublant comme elle peut le thème de 
Que ma joie se meure. 
Encourageantes, au final, 
Conversations à voix basse. Apprendre à une écriture qui ne crache pas sur les mélodies à accepter une approche plus expérimentale de l’interprétation, à se contenter aussi d’un fond répété pour toute consistance propre à accueillir l’intelligence de quelques trouvailles fulgurantes. Le mélange réussi de choix que d’autres auront longtemps dit exclusifs, de peur sans doute d’avoir trop à faire. 
	
	
		Chroniqué par 
		Grisli		
		le 26/09/2005