Faire une musique inspirée par
Zero 7 et
Air en 2005, cela ne va pas forcément de soi, tant le « trip-hop », genre qui a connu son heure de gloire au milieu des années 90, est aujourd’hui devenu une étiquette presque honteuse, synonyme de ringardise musicale, de bons sentiments larmoyants, de recyclage cinématique sans saveur, bref rien de ce qui nous fait vibrer en 2005.
Certains groupes continuent pourtant, vaille que vaille, de creuser une veine downtempo aux variations électroniques mélancoliques, aux lignes vocales sensuelles et fragiles, aux beats electro moelleux, aux sons analogiques enveloppants. Et si c’est l’expression electro-pop romantique qu’a choisi
Tkth pour communiquer sur sa musique, c’est dans les bacs trip-hop qu’on retrouvera ce disque. Rendons justice pourtant au groupe de ne pas nous offrir une copie trip-hop délavée du premier opus (réussi certes) , pour évoluer au contraire vers une musique presque dansante parfois (
club ’84, attrayant, bien que le choix facile du vocoder grille un peu le morceau ), étoffée d'une programmation à tiroirs minutieuse, et qui parvient à nous fait entrer sans peine dans un cocon de musique délicatement filé. Si Cécile Morel-Journel chante sur
Fourth dimension et est auteur des textes, c’est sa sœur Béatrice qui habite le reste de l’album de son chant agréablement charmeur, ainsi sur le langoureux
Five light feelings, qui mêle textures chaudes et froides avec talent. Le crépusculaire
soap opera et son duo masculin-féminin Arno et Béatrice, conforte le savoir-faire indéniable de
Tkth en matière d’atmosphères cinématiques.
Lorsque le cocon se fissure, et que de légères dissonances s’infiltrent dans les arrangements fouillés d’Arno, la musique se pare d’une étrangeté qui la rend plus ambiguë (
Sad thoughts), ainsi ce piano presque discordant au milieu de ces nappes synthétiques sombres.
On pourra toujours dire que le trip-hop est mort, il a enfanté avec ce disque un rejeton bien vivant, qui n’en est pas la triste caricature.
Tkth réussit avec ce nouvel opus à nous redonner le temps d’un album le goût pour les paysages oniriques d’un downtempo soyeux mais pas sirupeux. Ce n’était pas gagné, cela mérite d’être salué.
nota bene : ce n'est pas un vocoder contrairement à ce qui est écrit dans la chronique mais un voice generator qui a été utilisé sur
club '84 pour les voix masculine et féminine. Merci à Arno de Tkth pour cette correction.
Chroniqué par
Imogen
le 12/05/2005