Inutile de refaire les présentations. La
chronique du disque précédent fera l'affaire. Mais pour faire court,
Ecid est ce qui se fait de mieux en hip hop dans le Minnesota, en ce début de décennie. Il est vrai que le label
Rhymesayers était jusqu'ici l'unique centre d'attention du Gopher State. Jusqu'à ce qu'arrive cet autodidacte improbable qu'est
Ecid, portant à bout de bras son petit label
Fill In The Breaks depuis 2006. Mais c'est vraiment en 2010 qu'il se révéla, avec
AWOL One pour un
album éponyme produit par ses soins, et surtout
100 Smiles and Runnin' donc, produit par
Arsenic.
Werewolf Hologram est donc son cinquième disque solo. Un nouvel album qui a connu bien des péripéties car
Ecid a vu son disque dur, contenant une année entière de beats , se crasher lamentablement. Pas de deuxième sauvegarde, évidemment. Ou bien lorsqu'il compose
Back From Japan, déjà morbide à souhait, le tsunami frappait la côte ouest du pays. Des choses qui arrivent.
Influencé par
El-P,
Madlib, plus récemment par
Flying Lotus mais aussi par
Kanye West, les productions d'
Ecid ont de la gueule. Si celles concoctées pour l'album avec
AWOL One pouvaient par certains endroits clairement être sur une ligne El-P
-like, sur
Werewolf Hologram, on ne s'éloigne pas tellement du travail réalisé par
Arsenic en 2010. Moins d'envolées, plus de consistance.
Ecid impressionne par sa rigueur. Peu de couplets avec un goût de trop peu. Moins démonstratif, ici, on apprécie les rimes, amères, as usual. En terme d'ambiance, on est plus proche de l'univers de
Fuzati que d'un
Aelpeacha, pour une comparaison francophone. «
It's not about going fast » dixit
Busdriver, peu avare en paradoxe. La tonalité des productions veut ça. Et elles sont bourrées d'idées. Du sifflet impossible à se sortir des oreilles à la
Alessandro Alessandrini sur le titre d'ouverture, au synthétique et club-uesque
The Future Is Free avec
David Mars et
Leif, il trouve sa petite affaire coup sur coup. Parfois pas grand chose, suffisant pour tenir en haleine et ne pas raccrocher les crampons. Pour ce qui est des invités, on notera la présence du regretté
Eyedea sur
Rock Stars, mort fin 2010 à l'âge de 28 ans. Sur le même morceau,
AWOL One toujours : on annonce la suite de
AWOL One & Ecid Are pour cette année.
Des reproches ? Pas tellement. Les refrains fredonnés en double-voix, une constante chez
Ecid, pas loin de devenir un gimmick, parfois agaçant. Et, pour vraiment chercher la petite bête, ces deux derniers morceaux,
Surprise Yourself (malgré la petite référence au sublime Memento de Christopher Nolan) et
So Much Fire, pas indispensables. Mais c'est bien tout.
Werewolf Hologram est tout simplement un bon disque, bien produit, avec un MC sûr de son fait. La plus grande réussite d'
Ecid aura peut-être été de réitérer, moins de deux ans après, le coup de
100 Smiles and Runnin' : à savoir un album de plus de quatorze titres, sans faute de goût, et quelques tubes en prime. Et on parle de boom-bap en 2012.
Chroniqué par
Lebowski
le 25/05/2012