Sorti le 11 Octobre 2010 au terme de deux ans de labeur,
Ardour, signé sur le label de
Flying Lotus Brainfeeder, révèle le travail d'un artiste parfaitement dans l'air du temps. Los Angeles (encore) se retrouve au centre de cette vague créatrice. Cathédrale d'un hip-hop futuriste au rayonnement céleste. Ce n'est pas un hasard si on aperçoit de ses tours un
Teebs perché.
C'est une blessure qui détourne Mtendere Mandowa, jeune Californien d'origine malawienne et caribéenne, de sa première passion : le skateboard. Notre homme s'oriente alors vers la peinture. L'artwork d'
Ardour est une de ses compositions.
Teebs construit méticuleusement sa musique. Perfectionniste et amoureux de l'expérimentation, il crée une tambouille fourmillante qui, sous-couvert de cette douceur enveloppante, dissimule un sens du rythme poussé et une ingéniosité certaine.
On pourrait, pour aborder cette collection de dix-huit titres courts, comparer chaque morceau à une toile sonore aux couleurs chatoyantes.
Teebs nous offre des substances vivantes, des textures chaudes qui chatouillent l'oreille. Sourde et apaisée, l'ambiance appelle au détachement et au bien-être. Le beatmaker a voyagé et rencontré du monde ; peut-être la raison de cette surprenante maturité pour ses modestes 23 ans. Chaque piste dégage une mélancolie propre. "
Moments" subjugue l'instant présent, "
While You Doooo" le ralentit quand "
Burner" le cristallise. "
Bern Rhythm" est à mon sens ce qu'il y a de meilleur en terme d'émotion. Le titre impose une sorte de fragile brutalité, symbole d'une peur intime ou d'une phobie qui pourrait être celle de se retrouver perdu en pleine forêt. "
Double Fifths", joliment édulcorée, jouit en revanche d'une beauté surnaturelle et enivrante.
On se laisse facilement fasciner par le travail de
Teebs qui, souvent, touche juste. L'homogénéité du disque en rend cependant l'écoute ennuyeuse. Ou du moins, l'effet de surprise que provoquent les premiers titres finit par s'estomper. Toutes les pistes sont bonnes mais il manque cette claque sévère qui nous clouerait sur place.
C'est à priori le seul défaut du disque. Minime, donc, quand on songe à toute la finesse de la composition. D'une électronica rêveuse à un abstact hip-hop épuré,
Teebs assemble de manière convaincante toute sorte de sonorités qui approfondissent ses morceaux. Comme première livraison,
Brainfeeder ne pouvait rêver mieux. Attisant notre curiosité quant à l'avenir de la scène californienne et nous laissant augurer de belles perspectives pour la suite. Espérons ne pas avoir à attendre deux autres longues années pour que le Californien compose un nouvel album.
Chroniqué par
StellaDominique
le 30/01/2011