En 2008, le guitariste britannique Daniel W. J. Mackenzie, aka
Ekca Liena, publiait chez
Dead Pilot Records son premier album :
Slow Music For Rapid Eye Movement. Ce disque d’ambient à forte personnalité fut encensé par la critique et s'attira l’attention bienveillante d’un bon nombre d’amateurs du genre. A cette première réussite, vint s’ajouter dans la foulée un Ep, brillant à son tour :
Drones Between Homes ; paru cette fois chez
Under the Spire, un autre label solidement implanté dans le paysage ambient britannique.
Sleep Paralysis était donc attendu comme le messie, chacun espérant y trouver de quoi satisfaire ses attentes.
Comme son prédécesseur, le nouveau long-format d’
Ekca Liena se situe à la croisée des chemins. Quelque part entre un ambient massif, et d’autres éléments plus fulgurants : un post-rock à l’état larvaire et du doom en bonne et due forme. Et c’est là sans aucun doute la nouveauté de cette livraison. A l’évocation de ces genres pour le moins barbares, des noms nous viennent immédiatement à l'esprit : celui du cow-boy
William Fowler Collins mais surtout celui de
Svarte Greiner, dont le récent
Kappe laisse encore un souvenir tenace. Mackenzie partage avec ces deux artistes plus qu’un faire valoir stylistique, une même fascination pour les paysages sonores désolés et poisseux. Mais c’est son approche plus directe, plus mélodique des atmosphères, qui distingue le travail du britannique de celui de ses confrères.
Sleep Paralysis est bien la nouvelle bande-son de l’apocalypse à venir. Un chant résigné, celui d’une humanité sur le point d'agonir. Les décharges volcaniques de
Heavy Weath, de
June 4104, ou encore de
Paralysis, systématiquement soutenues par la frappe martiale d’un batteur sur ses fûts, sont autant de visions prophétiques mettant en scène des zones urbaines dévastées. Pourtant, cette musique est parcourue de fantômes, de présences autres qu’humaines qui lui confèrent une aura particulière. Une sensation difficile à décrire mais présente à chaque instant de ce
Sleep Paralysis. A côté de ces titres monumentaux, on goûtera avec plus de plaisir encore à des pièces plus habitées :
Step Failure, empli des hurlements d’une bête mécanique ; ou
Sulk, court interlude mélancolique et spectral.
Malgré quelques longueurs, quelques maladresses, et le risque pris de muscler son propos,
Ekca Liena convainc une nouvelle fois. Ce cauchemar, baroque à sa manière, a toutes les qualités requises pour se faire une place dans nos esprits. Ce n’était pas joué d’avance, tant le créneau en la matière apparaît de plus en plus saturé.