A l’origine d’
Activities of Dust, il y a 
Doug Scharin et des heures de feedback, enregistrées au cours de plusieurs années et de nombreuses sessions de mixage. De cette matière brute autant que délicate à manipuler, 
Doug Scharin a tiré des embryons de compositions, sculptés à même le signal sonore. 
Jeff Parker, guitariste de jazz et membre de 
Tortoise, a ensuite enregistré des parties de guitares à l’écoute de ces morceaux de feedback structurés.
Il a écouté, réagi à ce feedback, parfois pour simplement jouer à partir d’une impression, parfois pour en proposer, à la guitare, une relecture, une interprétation. 
Jeff Parker a donc fait du feedback instrumental à partir d’un autre feedback, sinusoïdal celui-ci. Cette musique est donc élaborée patiemment, elle ne s’invente qu’à la condition que ceux qui l’inventent l’écoutent avant de l’inventer. Pour composer, il faut d'abord boucler le son sur lui-même (le micro face à l'enceinte produit le feedback), puis écouter ce qui sort de cette boucle, le sculpter, puis l'écouter encore, y ajouter de la guitare, puis écouter encore... Processus sans fin, qui tâtonne si lentement qu'il exclurait presque le hasard de la composition. En même temps, et paradoxalement, cette musique possède quelque chose qui échappe à la simple volonté des musiciens.
Je m’explique. A l’intérieur de ces structures formées par le signal du feedback, il y a comme des mélodies latentes : des notes qui s’enchaînent, qui se superposent, et qui aléatoirement forment de la musique, de même que dans une symphonie de 
Glenn Branca pour ensemble de guitares électriques, la superposition des instruments finit par faire apparaître des mélodies fantômes. Les enregistrements de feedback, plus 
Jeff Parker, cela donne donc une musique en duo et la possibilité d’une dynamique, d’un mouvement, d’un dialogue, d’improvisations : la possibilité d’une liberté.
Ce dialogue accouche d’amorces de compositions sur lesquelles viennent bientôt se greffer une basse (celle de 
Bill Laswell ou de 
Sharin), des claviers (
Bernie Worell), une batterie (
Doug Scharin, dont on reconnaît le jeu caractéristique). Explorant aussi bien un dub mutant, tel que 
HIM le pratique parfois (
Shades of Appearance) qu’une musique plus atmosphérique où la guitare résonne comme un ensemble de nappes superposées (
Possibility Waves), ou des compositions plus axées sur le dialogue guitare / batterie (
Return to the Original Matrix et 
Written in Nowhere, dont l’excellence s’approche des meilleurs Tortoise), 
A New Mind fait à nouveau entendre 
Doug Scharin au meilleur de sa forme : ceux qui avaient été déçus par les efforts de 
HIM après le formidable 
New Features retrouveront le batteur au maximum de ses capacités. On y trouve à vrai dire les mêmes qualités : un groove plus enclin à suggérer une pulsation diabolique de précision qu’à la marquer frontalement, un drive d'exception, de longues structures en spirales, hypnotiques et progressives, une attention aux timbres et un travail des textures qui réjouissent le cerveau pendant que le pied bat la mesure en suivant la batterie.
En optant pour une démarche finalement proche de celle de 
Tortoise (la composition patiente de formes rigoureuses à partir d’une matière brute, improvisations chez 
Tortoise, feedback ici), 
Doug Scharin prouve, une fois n’est pas coutume, que c’est dans les vieux pots conceptuels qu’on fait les meilleures soupes. Et donc qu’il est bon, à intervalles réguliers, de revenir aux fondamentaux.
NB : Au disque est joint un DVD qui contient une vidéo réalisée par 
Scharin lui-même pour accompagner 
Return to the Original Matrix : petit film expérimental réalisé à partir d’images de métropoles américaines et qui retraite, là encore, un matériau brut en des formes rigoureuses. Vidéo qui n’est pas qu’un simple accessoire, mais qui apporte un contrepoint visuel élégant à une musique qui ne l’est pas moins.
	
	
		Chroniqué par 
		Mathias		
		le 29/12/2008