Static est le projet électro-pop de
Hanno Leichtmann accompagné de
Lars Rudolph,
Ronald Lippok (activiste bien connu officiant chez
Tarwater et
To Rococo Rot) et de
Christof Kurzmann, présence assez étonnante ici puisque
Kurzmann est davantage impliqué dans la musique électronique improvisée et bruitiste que dans la pop à machine et guitare et voix. Mais qu’à cela ne tienne.
Projet électro-pop,
Static ne révolutionne pas la donne depuis que
Hood et
The Notwist en ont posé les bases pour ainsi dire indépassables. Mais
Static ne joue pas vraiment sur le même terrain puisque, là où
The Notwist et
Hood placent à un niveau égal l’écriture pop et le traitement sonore,
Static déploie clairement une écriture déterminée par les machines, écriture pop moins dans les structures et les schémas qu’elle met en jeu que dans certains fragments mélodiques, certains passages d’un accord à l’autre.
Et surtout, c’est en se situant au croisement de
The Notwist et de
Tarwater que
Static invente sa définition de la pop, sans surprise majeure mais avec tout de même quelques vues intéressantes sur la question. De
Tarwater,
Static a bien sûr la voix mid-eighties et monocorde de
Ronald Lippok, sorte de croisement contre-nature entre un chant kraftwerkien et les vocaux de
Joy Division. Mais surtout, c’est une même coolitude absolue que les deux formations ont en commun, une sorte de havre ou de résidence secondaire pour musicien désireux de quitter le champ de l’expérimentation pour trouver quelque chose de plus éphémère et immédiatement hédoniste, sans trop réfléchir sur les implications à long terme de ce genre de pratiques. Une sorte de bulle, comme on prendrait des vacances, en quelque sorte.
Tarwater avait un certain brio dans cet exercice, en inventant une coolitude électronique, je veux dire une coolitude qui venait des machines elle-mêmes (et pas un esprit cool injecté dans la machine), un peu comme le Miles de
Birth of the Cool faisait sortir le cool de sa trompette. Chose belle, nous étions en présence d’une sorte de musique-coucher-de-soleil-exotique qui ne sonnait pas Club Med ni lounge, parce qu’elle était un espace directement issu du giron des machines : une musique dont l’esprit se confondait avec son médium. Si j’en parle tant, c’est qu’elle était (et l’est encore) clairement l’horizon auquel se réfère la musique de
Static, mais qui peine à l’atteindre avec autant de brio et d’épure.
Re : Talking about Memories joue à fond et sans retenue cette logique du cool, ne triche pas, il lui arrive même, à l’intérieur de cette logique, de connaître ses ruptures, ses failles qui viennent paradoxalement en étayer la cohérence (l’harmonie qui décroche brusquement dans
Return of She, l’improvisation à la trompette sur
Shift, Smash, Surge, Swell). Mais il vient après, et malgré cette sincérité assumée des options de
Static, il ne retrouve pas la fraîcheur de la première fois. Abandonner, peut-être, les horizons crépusculaires orange et donner naissance à un nouveau cool.
Chroniqué par
Mathias
le 16/12/2005