Terres distantes et ignorant les forêts, les îles Féroé n’en accueillent pas moins un nombre conséquent d’obstinés oiseaux de passage. Des goélands bruns, troglodytes mignons, pétrels glacials ou mouettes tridactyles croisés un jour et enregistrés par 
Karsten Larsen, on trouvera la trace sur 
Fuglamál, Aviphonie n°3 de 
Kristian Blak, pianiste du coin, qui réarrangea les chants, piaillements et mouvements d’ailes, afin d’en faire une œuvre iconoclaste et surprenante. 
 Cinq tableaux se succèdent au gré de la boussole, et donnent à entendre un patchwork de plaintes menaçantes (
Eystur – Part I-III), d’instants d’envol (
Veingir – Part I) ou de traversée de grotte (
Sudur – Part III). Ailleurs, plus simplement, des preuves discrètes d’existence (
Vestur- Part II). Le son à peine retouché – les dénaturations de 
Blak se limitant à quelques larsens ou effets de potentiomètres –, c’est l’élaboration de séquences musicales qui fournit son intérêt extra écologique au disque. 
 Echantillons de rythmes fortuits (
Vestur – Part II), véritables compositions minimalistes (
Veingir – Part III) ou simili pièces électroniques hésitant entre ambiant sombre et cold wave étouffée (
Sudur – Part I-III), les résultats auxquels aboutit 
Kristian Blak lorsqu’il s’attache à transformer sa matière première rivalisent d’étrangeté, et se partagent une même réussite. 
 
Fluglamál, Aviphonie n°3 est un passage en terres féroïennes, littéralement « îles de moutons », qu’on n’a pas une seule fois entendu. Les dernières interventions (
Nordur – Part I-III), plus brutes dans leur traitement, nous ramènent au matériau originel d’un projet musical curieux autant qu’abouti. Elles nous raccompagnent aussi, et sereinement, au nid. 
	
	
		Chroniqué par 
		Grisli		
		le 18/01/2005