Le retour au psychédélisme atteint aujourd'hui une telle frénésie qu'il n'est pas étonnant que la plupart des groupes se revendiquant de ce genre finissent les uns après les autres par procurer un ennui diffus puis définitif. Parce que justement, la plupart de ces groupes n'auront ressuscité la mythologie psyché que pour en offrir une vision de papier peint: distorsions chatoyantes, synthés antédiluviens, pupilles dilatées et garde robe cosmique aux couleurs dépareillées. Tout ça vite affiché et vite oublié.
Dans tout ce bazar, ce sont les rares petits malins qui auront compris que le psychédélisme a moins à voir avec un attirail de collectionneur et une chevelure convenablement entretenue qu'avec une certaine énergie et surtout une manière singulière de la dépenser, de l'éprouver dans la musique, qui auront une chance infime de marquer vraiment, du moins de relier le passé à une préoccupation réellement contemporaine.
L'intérêt du troisième album des britanniques de The Oscillation, ironiquement intitulé From Tomorrow, est de ne jamais sombrer dans cette triste vision de carte postale du psychédélisme que des groupes comme Tame Impala ou MGMT s'échinent à faire passer pour une nouvelle bible du cool, pour capter plutôt le pouvoir de sidération, primaire et atemporelle, de la saturation et de la répétition en puisant avantageusement dans les rythmiques pesantes et métronomiques du krautrock.
Trois titres particulièrement bien troussés (Corridor (Part 1) mais surtout No Place To Go et All You Want To Be) se démarquent en poussant jusqu'au seuil critique cette dépense d'énergie qui est l'essence du psychédélisme, l'action par laquelle, en une poussée électrique et primitive, cette musique troue le mur de la réalité et s'en échappe. Le geste, répétifif et tranchant, n'est pas sans rappeler les morceaux les plus joliment régressifs de Spacemen 3 sur l'album Sound Of Confusion (Losing Touch With My Mind, Hey Man, Mary Anne ou 2:35), principale influence de The Oscillation sur ce From Tomorrow, grésillant, nerveux, faute d'être vraiment surprenant.