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: Ui



Retour sur Ui, groupe new-yorkais acteur de la scène post-rock américaine des années 90 encore trop peu connu du public actuel…

À la rédaction de dMute, on ne saurait vous mentir en disant qu’être des passionné.es de musique, écrire à ce sujet et en parler à qui voudra nous entendre peut aussi conduire à en jouer d’une manière ou d’une autre… Ou serait-ce dans le sens contraire ? Quoiqu’il en soit, l’aventure de Ui (prononcé « ouu – ii ») part de la passion commune pour la musique de deux hommes : Clem Waldmann, batteur et percussionniste au style tantôt jazz, tantôt rock, ayant notamment collaboré avec They Might Be Giants ou encore The Blue Man Group, et Sasha Frere-Jones, musicien multi-instrumentiste dont le talent de musicien n’a d’égal que sa carrière en tant que critique musical au magazine The New Yorker.

En un peu plus d’une décennie, le style de Ui a eu de nombreuses facettes. Mais ce qui marque le style du groupe, ce sont ses compositions post-rock éthérées, portées par deux guitares basses jouant en harmonie sur des mélodies et instruments divers.

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Après la fin de son groupe Dolores en 1990 ; Frere-Jones fonde avec Waldmann le groupe Ui. Le projet est majoritairement instrumental, avec des compositions rock le rapprochant d’un Slint ou d’un Tortoise. Son premier EP The 2-Sided EP sort en 1993 et comprend sept titres qui tirent au maximum le profit des instruments de prédilection de ses deux fondateurs : la batterie et la basse. Wilbo Right, le second musicien à cordes du groupe, varie d’ailleurs sur cet album entre la basse et le banjo (Horn Crown Label) pour créer des morceaux tantôt courts et dynamiques (Piñata, Scrape), tantôt longs et étirés (I Will Not Make Inconsiderate Requests, qui aura d’ailleurs en 1995 un petit « frère », Special Requests, sur l’album Sidelong).

Aujourd’hui, The 2-Sided EP est souvent trouvé combiné à l’EP de 1996 The Sharpie EP, dont les trois longues compositions tirent parti des effets électroniques, des extraits audios et de l’enregistrement sur bandes analogiques multiples des instruments du groupe (on entend Waldmann jouer sur sa propre piste de batterie sur Have A Good Time) ; cela au service de l’ambiance éthérée, voire même décharnée propre au style d’Ui (The Sharpie). Le dernier titre Skeletons offre une vision plutôt réaliste, voire nihiliste de la mort, sur un rythme chaloupé et dansant à la double basse. Sasha Frere-Jones y chante : « When we die ; when we die we become skeletons / I hear the skeleton laugh ; As it bang, bang, bangs at the back of my back ». Traduction : « Quand on meurt, quand on meurt on devient des squelettes / J’entends le squelette rire, et cogner, cogner, cogner au dos de mon dos ».

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Le groupe signe ensuite chez Southern Records, qui sera son label privilégié tout au long de son activité. Sidelong, le premier album issu de ce nouveau partenariat, combine les éléments et bonnes idées du 2-Sided EP, en y rajoutant une pâte plus rock (Johnny). Le titre d’ouverture August Song annonce la couleur avec sa double (voire triple !) basse, son banjo final et la rythmique incessante de Clem Waldmann sur les cinq minutes trente du morceau. Frere-Jones pousse encore la chansonnette absurde pour nous parler de masturbation (Sexy Photograph) de papillons (Butterfly Who) ou encore du soleil (Golden Child). L’album est un succès dans la sphère du rock underground.

Sur cet élan de bon augure, deux singles (Match My Foot et Dropplike) sortent en 1996, ainsi que le fameux EP The Sharpie EP. De belles collaborations également avec un remix de Sexy Photograph par John McEntire sur la compilation Unlike Remixes vol. 1 en 1995 ou encore le projet de « supergroupe » Uilab avec Stereolab sur l’album Fires en février 1998, qui déclinera en quatre versions le St. Elmo’s Fire de Brian Eno. L’album comporte aussi deux titres complémentaires qui présentent chacun la facette de l’un des deux groupes : Impulse Rah! pour Stereolab et sa rengaine pop ternaire et Less Time pour Ui dont le thème musical sombre et inquiétant en double basse est sublimé par le chant naïf du duo Sadier/Hansen.

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Le 1er avril 1998 paraît Lifelike, leur second album. Plus électronique et ne contenant plus d’intermède chanté, l’album très expérimental garde les codes Ui (Blood In The Air), avec cette fois-ci l’intervention de cuivres (Undersided, Green Of The Melon) qui contribuent à créer cette atmosphère éthérée chère au groupe. En plus de la forte composante électronique, on apprécie les incartades hors genre du groupe, comme sur le titre Acer Rubrum et sa rythmique dub. Le groupe recycle également ses propres idées musicales en reprenant une ligne de basse de Skeletons sur News To Go Further. L’album est original et ambitieux, avec des couleurs propres au jazz ou à la musique à l’image. Mais il passera malheureusement assez inaperçu, Tortoise ayant sorti moins d’un mois avant son légendaire TNT.

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Il faudra près de cinq ans au groupe pour se remettre de ce coup « explosif » avec Answers en 2003. Rejoint pour ce projet par Erik Sanko (musicien ayant notamment joué avec Yoko Ono ou encore John Cale), l’album est plus radical et direct. Les chansons-thèmes se suivent, enchainant ambiances solaires (Mrs. Lady Lady, Boxer-Painter) et « bangers » post-rock (Answers, Sleep Hold). Ce sera la dernière sortie du groupe, qui arrêtera sa course la même année. Erik Sanko poursuivra ses collaborations artistiques et son travail avec son groupe The Skeleton Key tandis que Wilbo Wright participera à d’autres projets musicaux. Clem Waldmann continuera ses collaborations avec Blue Man Group et d’autres projets dans un style plus jazz. Enfin, Sasha Frere-Jones se fera connaître en tant que critique musical auprès du magazine The New Yorker.

Ui est donc un groupe à la pâte propre et identifiable, solide, dont la carrière méconnue recèle pourtant de belles œuvres. Le groupe a collaboré à sa manière à l’émergence du style post-rock, et a côtoyé de grands noms de la musique indé des années 90. On en vient à se demander s’ils ne feraient pas, eux aussi, partie de ces grands noms ?



par Jonathan
le 26/04/2023

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