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Dour

: Édition 2010



Notre compte rendu

Je me souviens l'excitation qui précédait mes premières éditions du festival de Dour. Six mois durant, j'essayais de motiver les potes à venir. Les premiers noms à peine lâchés, je restais scotché au forum du site, guettant la moindre annonce, la moindre confirmation qui soulage un tant soit peu l'impatience d'y être. J'ai cru que cette insatiable envie me rongerait chaque année avec autant d'ardeur. Sept ou huit éditions après, elle a fini par se dissiper. Je ne me pose plus la question d'y aller, j'y vais, parce que c'est ainsi. Dour est devenu l’évènement incontournable qui balise chacun de mes étés. Je suis comme ces connards qui vont chaque année déposer leur graisse dans la même chaise dépliante, devant la même caravane au camping de Mes-Couilles-Les-Bains. La seule originalité qui s'inscrit dans mes perspectives estivalières est finalement d'envisager de faire d'autres festivals... en plus de Dour. Parce que la manifestation belge a la formule qui me sied le mieux : éclectique ; un peu pointue ; pas trop non plus ; pas très loin ; pas très chère non plus, si on rapporte au nombre de groupes programmés ; et surtout, on peut y faire la teuf jusque cinq heures du mat'. J'ai malheureusement dû rayer de mes arguments phares la possibilité d'entrer la picole sur le site même du festival. Depuis quelques années il faut ruser, ce qui rend Dour un peu plus proche de n'importe quel festival lambda.

Mon premier Dour, je l'ai fait sans potes, accompagné de ma copine seule. Ces quatre jours lui avaient donné tout le loisir d'apprécier le craignos que j'étais : alcoolique, irresponsable, crasseux et puant. La dernière fois que j'ai pris de ses nouvelles, elle bossait toujours pour cette grande marque de luxe qui lui paie des hôtels quatre étoiles pour aller aux quatre coins du monde brasser du vent avec d'autres gens qui brassent du vent. Elle attendait même son premier enfant d'un mec sûrement plus classe que moi – tout au moins, plus pantouflard. Allez à Dour en couple et la moindre dissemblance chez votre moitié suintera de tous ses pores. C'est pourtant l'expérience que je tente à nouveau cette année en y allant avec Julie. Ce n'est pas faute d'avoir essayé de rameuter la troupe, personne n'a suivi. Boulot, prog qui ne plaît pas, un tas d'autres conneries en guise d'esquive. Nous sommes donc partis de Paris à deux, en bus. Ce n'est pas une si mauvaise option ; ça évite de mendier une caisse ou de négocier le transport de son cul dans une autre déjà conduite.

JEUDI

La mise en condition reste toujours à peu près la même. On ne reconnaît pas ma tête sur la carte d'identité ; je souris ; on me donne un bracelet ; on me demande si j'ai pas de verre ; je souris ; on me laisse passer. Les premières sections d'ivrognes remontent à contre-courant le cortège de sac-à-dos, paniers, glacières et tentes Quecha. La suite est un ballet de tickets picole, bières, mats, sardines, cordes, gonfleur, flotte, pastis, et riz façon paëlla d'Uncle Ben's deux minutes au micro-onde de la Cooking Island.


"Heureusement que j'ai le compas dans l'œil."


Les préparatifs terminés, nous nous décidons enfin à franchir les portes du festival. Je m’engouffre dans la foule massée à l’entrée, une bouteille d'alcool écrasée dans le slip, une bouteille d'eau à la main. Quelques minutes plus tard nous échouons devant la Last Arena.
"Plus qu’à préparer le mélange !" m’enthousiasmé-je tandis nous nous installons sur les maigres touffes d’herbe qui parsèment le sol. L’ambiance est détendue. Un peu trop même. Si je n’avais à l’instant avalé ma première rasade de pastis, je me serais sûrement transformé en un genre de protozoaire hippie, me greffant à la colonie, ingérant de la vibe par phagocytose. Au lieu de ça je regarde les gros mollets de la gonzesse devant moi se balancer de gauche à droite et je lâche un rot anisé.
- T’as les rides du bonheur, me fait remarquer Julie.
- Ben ouais, j’sais pas, j’suis bien là, allongé, sous le soleil, avec mon pastis. J’ai enfin l’impression d’être à Dour. Le groupe entame une reprise reggae de Take 5. Tu reconnais ça ?
Je fredonne l’air.
- Nan
- Mais si ! Je siffle l'air un peu plus vite.
- Ah ouais, ça. Elle fredonne à son tour.
- C’est le truc de jazz là, dis-je le regard évasif. C’est connu mais j’me rappelle plus du nom.
- Ouais, je vois. Tu peux me prendre en photo ?
Elle sort l'appareil de son sac, je prends le cliché, puis elle me le reprend des mains.



- Ça me fait des gros bras, tu trouves pas ?
Deux chansons plus tard, je commence sérieusement à me demander ce qu’on fout là. C’est mou, pas vraiment le concert auquel je m’attendais.
- Viens, on s’arrache, fais-je à Julie. Y’a un groupe de hardcore qui joue sur une autre scène.
- Ben pourquoi on est là ?
- C’est le New-York Ska Jazz Ensemble, qui joue. J’ai confondu de nom avec le Tokyo Ska Paradise. Les noms de ville, tout ça...
- Cédric qui préfère le ska au hardcore. On aura tout vu.
- Au moins un truc que tu pourras te vanter d'avoir vécu avec moi.

Nous allons donc voir le tatoué brailler sa rage d’être en t-shirt rouge : Hood, pour un décrassage d'oreille en bonne et du forme. S’ensuit le premier kiff de ma gonzesse – c'est suffisamment rare pour être signalé – Beast. "J’aime bien les voix comme ça" me confie-t-elle. Mais nous écourtons le concert pour aller nous ravitailler au camping. Je planque ce qu’il me reste de pastis sous une grille du festival ; je peux encore me le permettre tant qu'elles n’ont pas toutes été aspergées de pisse.

Il y a des groupes dont les concerts surpassent la production. Des groupes dont les albums ont peut-être mal vieilli, dont les budgets n’ont pas suivi, ou dont la folie pouvait difficilement survivre au pressage de la galette. Et puis il y a l’inverse. Des groupes qui jouissent d’une prod monstrueuse, et quand vous les retrouvez en concert, l’énergie qui vous explose à la gueule ressemble à cette chiure de coccinelle que vous vous êtes mangé dans l’œil pendant vous mangiez des chips au barbecue de Bernard. Le premier titre que j’ai entendu d’Hadouken, sur myspace, avait des relents de Prodigy plutôt coolos. Il m’a pourtant suffit d’écouter l’album entier pour déchanter aussi vite. Je n'en gardais pas moins l’espoir de voir quelque chose qui n’envoie peut-être pas le steak, mais qui ait assez d’énergie pour me mettre en appétit, quelque chose d’un peu teenager, Linkin Park à casquettes et mèches fluo. Mais ce concert ne fut qu’une grosse blague. J'en ris encore tandis que nous avançons vers le Dance Hall. Wax Tailor s'y produit dans quelques minutes. J'appréhende plus ou moins ce concert. Il faut dire que le bonhomme se traîne la réputation d’être un gros relou en live. "Allez surtout pas le voir" nous prévenait plus tôt dans la journée une nana du bus. Nous profitions d'une pause pipi pour comparer nos programmes prévisionnels, et mes recommandations personnelles n'avaient pas vraiment fait mouche. Au moins ma description d'Otto Von Schirach – "un mec en slip de Superman qui fait de la musique avec des rots et des bêlements de chèvre" – avait attisé la curiosité. "C'est chiant, justifiait cette nana, le mec se bouge pas, il est comme ça." Et elle se balançait les bras le long du corps, la moue coincée, avant de nous conseiller d'aller voir Faith No More. Pour ce qui est du côté Playmobil, la nana avait peut-être raison, mais pour ce qui est du concert, elle avait tout faux. Nous retrouvons Wax Tailor accompagné de sa violoncelliste, sa flutiste, sa chanteuse, et même un MC venu claquer son flow le temps d’un hip hop. Ça bouge, ça s’enchaine, pas vraiment le temps de s’ennuyer.

Si je vais ensuite voir Devildriver, ce n’est pas tant pour moi mais plutôt pour l’ado que j’ai été il y a huit ans. A une époque où je désirais plus que tout voir ce putain de groupe. Les programmateurs de Dour ont souvent un train de retard. Sur ce coup là, ils font fort. La bande de Dez Fafara nous fait un putain de show, un godiveau giclé des couilles de l’enfer comme on a peu souvent l’occasion d’en goûter. Il y a huit ans, je serais sorti de là couvert de sang. Aujourd’hui, je me foule le petit doigt en tabassant le dos d'un mec. J’ignore si j'en suis quitte avec mon devoir de mémoire mais j’ai le sentiment d’avoir payé de ma personne.


"En route pour l'enfer !"

Sur le chemin qui mène à la Last Arena, je repère, l’espace de quelques secondes, un mec se masturber.
- Attends !
- Quoi ?
- Là...
Je le cherche du regard. Y’avait un mec en train de se branler.
Julie me vise d’abord avec incrédulité, puis lâche un sourire hésitant. Elle ne sait pas si je déconne ou non.
- Putain, j’le trouve plus, dis-je juste avant d’être bousculé par un type torse nu.
- Viens, on avance, fait-elle, pressée par la foule.
Elle me tire par la main. Nous progressons de quelques mètres, je remonte à sa hauteur.
- J’te jure, le mec, il était là, la main dans le calbute !
Elle hausse les sourcils. Nous nous frayons un passage entre deux groupes de festivaliers dont les regards sont tournés vers Faith No More, pour découvrir plus loin une petite clairière de gens assis. Je crois halluciner : un autre mec en train de se palucher le phalus, au milieu, comme si de rien n’était.
- Et là ! m’écrié-je en le montrant du doigt. Il se branle pas peut-être ?
Julie le considère quelques secondes, sa tête se renfrogne.
- J’sais pas... Viens.
- Où ?
- Plus loin.

Mais plus loin, c’est une nana que nous trouvons la main dans la culotte, puis un mec, et encore un autre. Julie me tire maintenant vers la baraque à frites.
- Attends, c’est ouf ! Le big type là bas, il a carrément sorti sa queue !
- Viens, on se casse.

En m’éloignant, je tourne une dernière fois la tête vers le mec qui avait les burnes à l’air. Je ne distingue plus qu'une bouche ouverte béante au ciel. Le cri que vient de bêler Mike Patton a dû lui provoquer un orgasme.

La soirée continue avec Moderat. Le son est bon ; la digestion de Julie beaucoup moins car le cornet de frites sauce andalouse qu’elle vient de s’enfiler la cloue au sol. L’épave assise à côté profite de la situation pour l’accoster, et Julie de m’implorer du regard pour que je ne la laisse pas seule avec. "Tiens, lui dis-je en désignant le mec qui ne perd pas une seconde, j’te confie à mon pote fracasse pour qu’il te tienne compagnie. Moi, j’vais dancefloorer." Julie apprécie moyennement la proposition ; l’épave sourit de toutes ses dents de requin. Je me remplis la panse de pastis, et prends en photo une meuf sans trop savoir pourquoi.



Une heure aura été nécessaire à Julie pour retrouver l'usage de ses jambes. Nous pouvons donc bifurquer vers la Last Arena aller voir Simian Mobile Disco. Je me demande si c’est à cause de son nom que le duo s’est senti obligé de faire une ronde pour s’échanger les machines, ou par simple envie de varier les plaisirs. Au moins, le visuel apporte un peu plus d’intérêt que de voir leurs morceaux défiler sur winamp, car l'expérience de leur concert ressemble peu ou prou à cela, en version mixée.

Drumcorps n’est pas venu seul. Le chanteur d’Animosity, à qui il a déjà offert un remix, l’accompagne. Le concert a plus l'allure d'un show hardcore que la performance breakcore qu’il nous avait offerte il y a deux ans. La sauce prend moins bien, mais cela ne m’empêche pas de me démener comme un petit con. L’alcool coule à flots, et je m’octroie le droit de distribuer des points à chaque fin de morceau. Ceux qui m’envoient des coups de poing bien sentis ont droit à une tape amicale (mais pas moins virile) dans le dos. Les plus enthousiastes ont droit à une rasade de pastis. Et quand deux mecs se mettent à faire la toupie, envoyant valdinguer deux rangées de spectateurs, s’attirant en un minimum de temps un maximum d’insultes, mon cœur bondit. Je vais les féliciter d’une énergique poignée de main. Je finis par sortir du concert assoiffé.
- De l’eau, supplié-je en rejoignant Julie. De l’eau sinon j’vais mourir.
- Bouge-pas, j’vais te chercher une bouteille.
Mon diagnostic vital est en péril, et je ne peux me permettre d’attendre cinq minutes de plus. J’engloutis le reste de pastis en essayant de m’imaginer de l’eau bien fraîche.



Ça ne marche pas super. Julie me retrouve en train de rendre le petit jaune au pied du chapiteau. Elle profite de ce coup de massue pour insinuer dans mon esprit encore embrouillé l’idée sournoise de rentrer au camping. Je récupère progressivement mes facultés de discernement, mais ne me rends compte de la supercherie qu’une fois arrivé à la tente.
- Mais qu’est-ce qu’on fout là ? balbutié-je, j’avais encore des trucs à voir moi.
- Mais t’étais en train de vomir, on...
- J’vomissais pas ! J’me mettais les doigts dans la bouche pour m'vider le bide.
- C’est pareil.
- C’est pas pareil, c’était une gerbe de trop plein, pas une comme si j’étais malade. Quand t’étais malade des frites, toi, j’t’ai laissée tranquille.
- De toute façon, on est crevé du voyage,
assene-t-elle. On s’est levé tôt, faut récupérer pour demain.
- Mais j’avais...
Longue pause pendant laquelle on entend le cliquetis de trois neurones qui se connectent. J’devais voir Borgore ! J’devais voir Borgooooorrre.
Je m’effondre dans un long râle plaintif.

VENDREDI

Le pastis tempère les gueules de bois. Du moins, c'est ce que j'ai toujours cru. Peut-être est-ce dû au fait qu'on le coupe à l'eau, et que l'eau est le meilleur allié contre la gueule de bois. Ou alors c'est parce qu'il m'en faut moins qu'un autre alcool pour assurer mon ébriété. Quoiqu'il en soit, ce que je ressens au pénible décollage de mes paupières ressemble plus à une grosse fatigue qu'à une gueule de bois. Tant mieux. J'avais prévu de commencer la journée par Daedelus, mais troque malgré tout le concert contre une sieste. L'arrivée prévue de l'Irlandais en début d'après-midi efface un peu de cette culpabilité éprouvée de déroger au sacro-saint programme prévisionnel. Il faut l'attendre pour lui indiquer où est plantée notre tente.

C'est donc sur Caliban que démarrent les hostilités. Depuis le temps que je me les tape, force est de constater qu'ils n'ont plus rien d'excitant à offrir. Zenzile, sur la scène de La Petite Maison dans la Prairie, n'efface guère mon ennui. C'est à General Electrics que revient l'honneur d'éveiller mon attention. Fancy, le bras sur la hanche, offre au public ses meilleures pauses vintage tandis qu'Hervé Salters saute comme un diable derrière son clavier. Tout ça est très kiffant visuellement. Nous revenons au premier chapiteau qui s'est bien rempli depuis Zenzile. Normal, High Tone s'y produit. Le groupe lyonnais lâche la formule habituelle – masturbation dub, éjaculation drum'n'bass – qui, après tant d'années, conquis toujours sans problème le public.



Nous passons devant Gwar pour rentrer au camping. Gwar, c’est la private jock que les habitués du forum de Dour se balancent inlassablement chaque année. La requête décalée qui fait doucement sourire par son côté lourdingue et intransigeant : Dour ne peut pas se faire sans Gwar. Vous voyez le genre. Les programmateurs n'attendaient sûrement qu'une tournée du groupe pour les programmer, voire des promos sur les strings mohair. Voilà chose faite. Certains l'ont pris comme un ultime clin d'oeil au forum, désormais enterré par Facebook – il est fort probable que le forum se soit enterré lui-même sous le poids de ses éternelles vannes.

A mon retour au festival, le vigile me vire le pastis du fut. A peine le temps de réagir, je le vois planer, dans un ralenti digne des plus grands moments de tension du cinéma, pour aller se perdre dans un monticule de bouteilles. Ma vie me défile sous les yeux. Ce ne peut être possible. Dour avec ou sans Gwar, peu m'importe, mais Dour sans mon pastis, inacceptable. Nous, les Parisiens, nous faisons sans cesse emmerdés par les vigiles. Alors quand nous allons en Belgique et que nous entrons en soirée sans la moindre en fouille, nous avons un peu l'impression d'aller au boulot en slip. Ce vigile vient pourtant de me dégager ce luxe d'entre les couilles. Ça commence comme ça, et bientôt on ne nous laissera entrer qu'accompagné d'une chatte, comme à Paris, sapé comme un jeune blaireau dynamique, la bouche en cul de poule dans une piètre tentative de paraître sobre. Avant de livrer la démocratie par missile recommandé, les Américains auraient mieux fait de s'occuper des festivals belges. Les pires dictateurs s'y cachent : leurs décisions, on les accepte ou on va voir ailleurs. En l'occurrence j'acceptais plus ou moins bien celle du cache-cache picole tant que j'arrivais à incruster mes bouteilles sans trop d'effort. Mais la main sur les burnes, c'était tout sauf fairplay. Bref, je vais retrouver Atari Teenage Riot la mort dans l'âme. L'Irlandais a passé un mélange de vodka en faisant miraculeusement croire au même vigile qu'il n'avait que de l'eau dans son sac. C'est déjà bien mais ça sera loin d'être suffisant pour nos trois gosiers de soulards. Atari Teenage Riot me rebooste le moral grâce à un show exceptionnel. Chris Cunningham me console définitivement en mixant ses meilleurs clips sur écran géant. Il convint même Julie à qui je rappelle crânement la biographie du réalisateur.

Il reste une demi-heure avant Otto Von Schirach et nous avons tué la vodka. Les deux concerts que nous venons de voir m'ont réconcilié avec Dour, mais l'absence d'alcool se fait désormais ressentir comme un tesson planté à travers le foie. Dans une heure ou deux, j'aurai définitivement perdu cette douce béatitude éthylique sans laquelle chaque concert paraît un peu plus chiant qu'il devrait. C'est un peu comme le sexe finalement. En étouffant certaines inhibitions, l'alcool peut faire d'un coup quelconque une sauterie d'exception. Comme il peut provoquer une panne minable, kit ou double. Il peut aussi, en muselant tout esprit critique, rendre un concert surkiffant, comme il peut faire oublier pourquoi sommes-nous là, déplaçant alors notre centre d'attention dans l'échancrure d'une pute à frange. En attendant, si je ne trouve pas rapidement de solution, c'est sur mon dégrisement que je risque de me focaliser. Je pars donc en mission commando retenter le passage en force du pastis. Il faut innover. Puisque la première technique est grillée, je passerai cette-fois la bouteille par l'épaule. Un sweat par dessus et les bandoulières de sac-à-dos suffiront à la dissimuler. Il s'en faut de peu, puisque le vigile la touche du bout de doigt en me tâtant le dos, mais ça passe. Je m'en mets une sévère sous le coup de l'euphorie. Otto Von Schirach crache ses dégueulis habituels. Je me demande si les collègues du bus sont venus voir le désastre. Julie commence à lâcher prise sous le coup de la fatigue, l'Irlandais est à fond dedans. Bong-Ra prend la relève mais finit par nous emmerder : nous rentrons au camping.


Otto Von Schirach transforme l'Irlandais en coq ivrogne.


SAMEDI

Je me traîne comme un zombie jusqu'à la Relaxe Zone. A défaut de carburer direct au pastis, je m'accorde le luxe de tremper mes lèvres dans une mousse un peu forte. Mes envies de Chimay Bleue s'effacent devant le choix restreint de ce prétendu stand de spécialités bierreuses. Je me contente donc d'une Leffe 9, c'est déjà mieux que la pisse pétillante dont on nous abreuve le gosier. Les gens bronzent, bavardent, picolent, comatent, roulent des pets, matent derrière leurs lunettes de soleil, font les cons avec leur chapeau de con, et on peut entendre plus loin, sur la grande scène, Les Sales Majestés emmerder la société. Nous rejoignons quelques minutes plus tard une dizaine de potes aux mines fraiches. Ils ne viennent qu'aujourd'hui tâter du festival. Touristes.



A peine arrivés, notre coordination laisse déjà à désirer et c'est amputé de la moitié du groupe que nous allons voir Arkangel. Hardcore belge et larsens interminables, j'ai connu des propositions plus aguicheuses. Détour ensuite vers Mass Hysteria pour retrouver le reste de la troupe. Nous passons devant le Joe Piler Saloon qui bat son plein depuis le début du festival. Il s'agit d'un stand stylisé façon western érigé à la gloire de Jupiler. En pâture nous sont offertes deux nanas qui s'improvisent gogo-danceuses sans faire lever la moindre queue ; et une musique vraisemblablement tirée de la playlist utilisée pour animer la dernière kermesse de Sainghin en Weppes. Ce qui m'épate le plus, avec ce stand, ce n'est pas tant le monde qu'il réussit à engluer dans sa daube, c'est que des mecs puissent gagner leur blé en nous pondant des idées aussi minables. Je les vois bien présenter, collé à leur tronche leur air suffisant de spécialistes en marketing événementiel, leur concept à la mord-moi le nœud. Sérieusement, les gars de chez Jupiler ont-ils vraiment cru au changement de paradigme de la Jupi ? Ont-ils vraiment espéré nous voir troquer l'image du gros bide d'un beauf qui tond sa pelouse contre celle des fesses en jean d'une cowgirl teufeuse ? Je suis pris de vertige en pensant à toute la thune brassée par les marques dans l'espoir de polir leur image.

Nous apercevons devant la grande scène la mascotte de Dour. Il s'agit d'un Hollandais qui est devenu pour moi, à force de le voir chaque édition, une sorte de Charlie à retrouver. Je le croise toujours dans le même état. Sa particularité la plus amusante est le nombre de bracelets qu'il porte aux bras. Pas seulement celui de Dour, me confia-t-il une année, mais de tous les festivals qu'il a pu faire à côté. Pendant que nous calculons, avec un pote, combien de festivals seront encore nécessaires pour lui couper le sang des bras, la mascotte prend sa branche pour une guitare, puis pour un micro. Ce qu'il balbutie doit être au moins aussi intelligent que la succession de mots tirés au pif du dico scandée par le frontman de Mass Hysteria.



Je goûte mon premier Dourois sur Death Before Dishonor. Subtil arôme de fricadelle saupoudré de poussière, un peu de bière et d'urine.



The Spudmonsters se révèle être le premier groupe de hardcore réellement intéressant du festival. Le public monte sur scène histoire d'en être bien sûr. Les vigiles ont l'air bien crétin avec leur air de mecs qui ne savent pas quoi faire.



Puis retour au 'ping. Les collègues touristes ont abandonné l'idée d'entrer de l'alcool sans même d'avoir essayé. Je tente donc le tout pour le tout : passer avec deux bouteilles de pastis, une sur chaque épaule. Je présente d'abord mon sac grand ouvert mais le vigile grille mes épaulettes d'alcool. Il ne prend pas la peine de me virer les bouteilles, ce qui me laisse une deuxième chance. Je tente la file d'à côté, mais le sac-à-dos sur les épaules cette-fois. Ça passe. Après avoir ravitaillé les troupes, nous nous rendons à La Petite Maison dans la Prairie pour la grosse soirée dubstep. Nous perdons aussi tôt le groupe de touristes et je me retrouve avec double ration de pastis. Starkey pour échauffer la foule, puis Emalkay qui dégaine le gros wobble. Efficace. Suivent Benga et Skream, flanqués d'un MC que l'inspiration limite à répéter le nom des deux Djs. Les deux Londoniens sont à la hauteur de leur réputation ; j'y perds mes derniers moments de lucidité pour ne plus faire qu'un avec la musique.


Flagrant délit de cuite.


DIMANCHE

Il y a souvent une journée maudite à Dour. En règle générale, cette journée s'appelle dimanche. Sur les six scènes, quatre sont consacrées au reggae, au ska, et au rap français. Les deux dernières m'épargnent ce calvaire en proposant divers groupes de rock. Nous arrivons sur la plaine du festival sans grande conviction. Une surprise m'attend pourtant dans La Petite Maison dans la Prairie : Errors. La formation electro-rock, dont la musique se situe au carrefour du disco-punk et du math rock, constitue ma première bonne découverte de Dour. Feignasser comme je l’ai fait chaque début d’après-midi n’a peut-être pas non plus aidé à m’en faire connaître d’autres, je dois bien l'avouer.



La suite, sur The Van Jets, est beaucoup moins enthousiasmante. Si le groupe flamand a un don, c’est bien de jouer le rock le plus impersonnel qui soit, celui que vous avez l’impression d’avoir déjà entendu des centaines de fois sans pour autant en retrouver le nom. Le concert de Monotonix n’est guère mieux. Il suffit d’assister quelques minutes au concert pour comprendre l’intérêt que le monde leur porte : les pitreries du chanteur.



Il faut dire qu’on a pas souvent l’occasion de voir un tel déluge de conneries. Quand le mec n’est pas en train de slammer, il grimpe aux piliers du chapiteau (pour mieux plonger ensuite), pomme son micro, engueule le public pour qu’il veuille bien s’asseoir, improvise une sortie de chapiteau. Et le clou du spectacle semble être ce moment où il chante avec le public, tandis qu’on lui porte à bras levés un fut de batterie.

Anti-Pop Consortium est programmé au milieu des nazeries françaises, l’occasion d’aller tâter de la scène rap. Le groupe, ressuscité après huit ans d’absence, se démène comme il peut, mais la sauce ne prend pas. Le beatboxing est approximatif, il y a des flottements que les MCs ne parviennent pas à faire oublier. Une déception de plus pour un dimanche qui s’annonce de toute façon foireux.



The Raveonettes viennent malgré eux s’ajouter à la liste. Leur son est dégueulasse. Ça larsen, les instruments sont mal équilibrés. Ce n’est pourtant pas la première année que des groupes de rock voient leur son massacré sur la Last Arena. Je me demande si l’ingé son, du haut de son perchoir, entend vraiment la même chose que nous. Nous faisons nos adieux à l’Irlandais qui compte finir Dour sur Capleton. Nous rentrons au camping avec les tickets boisson dont il s'est héroïquement délesté.

Cette journée est tellement pourrie que nous avons trois heures à tuer avant de retourner sur le site du festival, chose rarissime un soir de Dour. Nous décidons donc de faire une sieste. Erreur monumentale. Quand je me réveille, il fait déjà nuit. Je ne m'en rends pas tout de suite compte car sous la tente, la lumière des spots qui éclairent le camping paraît la même que celle du jour. Je secoue Julie qui, sous mon insistance, finit par daigner poser un œil sur son portable. Il est 1h. Les Foreign Beggars doivent être sur le point de finir leur concert, quelle merde. Je secoue à nouveau Julie mais comprends vite, à ses pitoyables gémissements, que je finirai la soirée seul. Je lui pique ses tickets boisson, ceux de l'Irlandais ; il y en a assez pour m’assurer un flot continu de bière jusqu’à la fermeture. Il ne faut pas non plus que je me mette trop la race car demain nous avons le bus de retour à Paris. C’est donc sans une goutte de pastis que je reviens sur la plaine du festival.

The Glitch Mob m’accueille par un set bien sympathique. Pas vraiment glitch, plutôt break, electro, des trucs qui font bouger les gens quoi, mais sympathique quand même. Je bouge ensuite dans le chapiteau où se produit DJ Kentaro, plein à craquer. Un écran a été installé derrière lui pour permettre au public de voir ses mains danser sur la platine. Pas mal non plus, même si j’aurais aimé entendre des choses un peu plus originales que l’éternel Jump Around d’House of Pain. Un mec me demande une goutte de bière. En temps normal je l'aurais envoyé chié, mais j'ai un tel stock de tickets que je lui file ma bière et lui passe de quoi nous en apporter deux autres. Le mec doit me prendre un demi-dieu. Ou pour le roi des cons. Le crew Dub-Timus prend ensuite le relai et j’ai du mal à me décider. Au moment où je m’apprête à décamper, un gros wobble bien fat me rattrape par le col du t-shirt. Je reste quelques minutes de plus, histoire de voir comment tout ça va évoluer, mais finis quand même par me barrer. Pas ma came. Ne reste plus que DJ Elephant Power pour terminer la soirée. Ou me tracer. J’ai encore des bières à picoler, et son mix qui balance entre techno et dubstep me retient jusqu’au bout.

Pour la première fois alors depuis le début du festival, je calcule le retour à la tente. D’habitude ce passage là est complètement effacé de ma mémoire. Je profite du coup de ma surprenante lucidité pour écouter le type devant moi draguer une petite blonde néerlandaise. Son anglais me rappelle celui que je pratique dans mes pires états d’alcoolémie, et que j’ai toujours l’impression, sur le moment, de parler à la perfection. Il tente de lui parler de drum’n’bass. Loupé, la nana préfère le dubstep. Il lui explique qu’il bosse pour la radio, puis la discussion devient assez floue, si on peut appeler une suite d'onomatopées foireuses une discussion. Pour éviter le blanc fatidique, la nana rejoint le groupe devant. Je me rends alors compte que le type n’est pas seul ; son pote marche quelques mètres devant, au milieu des deux copines de la blonde. Arrivés devant le camping B, les français s’arrêtent. Le mec de la radio insiste : "vas-y Jean, on les suit !" mais son pote n’a pas l’air emballé. Les Néerlandaises, elles, n’ont pas attendu pour les saluer. Elles tracent vers le camping C. J’ai vécu tellement de loosdés que d’en voir une se dérouler sous mes yeux me touche profondément. J’ai de la sympathie, pour ce mec qui doit maintenant rentrer en pensant à la crampe qu’il a failli tirer dans une ultime tentative à l'arrache le dernier jour, en traitant Jean pour s’être dégonfler devant une occasion pareille. Mais j’ai beau ne rien comprendre au néerlandais, je capte très bien ce dont parlent les trois nanas désormais. Des deux gros boulets de Français dont elles n’arrivaient pas à se débarrasser. Elles n’ont pas l’air d’y aller de main morte. C’est bien les meufs. Elles font de grands sourires, s’interdisent par politesse d’esquiver, mais une fois le dos tourné, l’acharnement qu’elles mettent à insulter l’indésirable est pire encore que si elles l’avaient dégagé à coups de batte dans les burnes. Je n’ai plus besoin, pour ma part, de leur offrir pareils exutoires. Tout le monde n'a pas le luxe de s'offrir un petit chaperon rouge qui l'attend sous la tente.


Owned



Par Tehanor
le 07/08/2010
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Dour, nous y voilà. Encore une fois, c’est toujours la même excitation de retourner sur la Plaine de la Machine à Feu. Petit résumé de cette 20ième édition.




Jeudi 15 Juillet


Je vous épargnerai le début de journée qui est commun à beaucoup de festivaliers. Il est 19h, les festivités peuvent enfin commencer. Nous nous rendons à la Magic Tent pour Hadouken qui nous présente un concert très décevant, probablement dû à un taux d’alcoolémie trop prononcé. Bref, ça ne décolle pas. On profite de Wax Tailor comme fond sonore pour déguster notre premier burger belge. Maussade…
Vient ensuite la dum’n bass de Murdock qui nous présente un set efficace, avant de découvrir Highbloo, jeune belge, présentant une electro très pêchue. Moderat, accompagné du VJ Pfafinderei, aura été le plus beau moment de cette première soirée. Les projections video collent parfaitement aux mélodies minimalistes de cette rencontre.


Kmeron



Dans un style complètement opposé, fidget house aux influences 2-step, nous retrouvons The Count & Sinden. Puis, 1h30 de Gui Boratto, techno minimal qui nous donnera le sourire tout au long de son set. Nous achevons cette première soirée avec Borgore, savant mélange de dubstep, rock et hip-hop.


Vendredi 16 Juillet


Daedelus, programmé vers 14h nous propose une musique intelligente et expérimentale, accompagné de son monome. Suivent Dan Le Sac vs Scroobius Pip qui nous présentent un electro hip-hop déjanté plutôt intéressant. Pour le reste de l’après-midi, nous avons squatté le bar à bières (avec la meilleure de Belgique d’après les serveurs, soit la Hoegaarden Grand Cru !!) jusqu’au concert dispensable de Dog Eat Dog, exceptés pour les nostalgiques, dont je fais parti. Petit passage devant High Tone jouant ses morceaux devant un public déjà conquis par leur nouvel album. On rigole quelques minutes devant la prestation de Gwar et leurs déguisements fantasy héroïques, agrémentés de plaisanteries gore. Cette programmation serait née d’une private-joke sur le forum… Puis, on redécouvre Fun Lovin Criminals, et leur vieux tube, Scooby Snacks.

22h30, l’enchainement draconien commence.

Quelle joie de retrouver Paul Kalkbrenner jouant la quasi totalité de sa BO Berlin Calling. C’est vraiment un live jouissif. Je ne veux pas quitter le dancefloor. Seulement, Atari Teenage Riot rejoint bientôt The Red Frequency et pour rien au monde, je louperai ce groupe. Pour cette reformation, CX Kidtronic a été recruté en remplacement de Carl Crack. Alec Empire, lui, saute dans tous les sens. Leurs morceaux sont toujours aussi explosifs, un beau moment chaotique.


Noah Dodson



On peut ensuite admirer les meilleurs clips de Chris Cunningham au Dance Hall accompagné d’une playlist en parfaite symbiose avec ces videos. Je cours vers le Club-circuit Marquee où Carl Graig joue la dernière demi-heure de son set. Techno made in Detroit !
Il y a bien sûr le live d’Otto Von Schirach mais nous optons pour le mix intense de Dave Clarke, nous remémorant les plus belles soirées Automatik, au Rex à Paris.
La suite parait un peu ennuyeuse avec Agoria mais son prédécesseur avait placé la barre très haute et était musicalement différente. Pourtant, le patron d’InFiné nous réserve de belles surprises et nous confirme tout son talent. Un set très agréable avant de finir sur les rotules avec Dimitri Andreas. Quelle chouette soirée !


Samedi 17 Juillet


Pour ce 3ième jour, de bons groupes metal/hardcore jouent à la Magic Tent. Je m’étais juré d’y voir quelques concerts mais le bar à bières devient notre QG officiel, et je loupe toutes mes promesses. La mélancolie de Chokebore aux accents noise et le rock psychédélique de Black Mountain ont été de belles surprises. Surtout pour ce dernier qui donne un attrait plus prenant sur scène que sur disque. Pendant ce temps la furia de Mass Hysteria continue à trouver des adeptes.

Pour les fans de hip-hop, De La Soul fête les 20 ans de leur premier album, accompagné de Rythm Roots All Stars. Hélas, ce concert est fade et ne répond pas à nos attentes. En revanche, celui de Pete Rock & CL Smooth présente du bon son old-shcool comme il se doit.

Etienne de Crecy, lui, continue à nous épater avec son installation cubique. Un peu moins avec les titres de son live 2.0 mais on y passe quand même un beau moment.
The Subs tournent depuis longtemps mais cette année, tous les festivals se les arrachent. Même si leur disque est ennuyeux, le groupe déborde d’une grande énergie sur scène et provoque une grande hystérie dans la fosse.

Je retiens surtout les 2 heures passées à la Petite Maison dans la Prairie devant Skream & Benga, chose rare en France tant la scène dubstep est faiblement développée. La présence du MC et la sélection de quelques titres mainstream peuvent devenir exaspérantes mais on se laisse prendre au jeu. Quelques perles figurent dans leur setlist à mon plus grand plaisir.


Mathieu Drouet



La réputation de BunZero n’est plus à faire. Il propose une vision du dubstep plus froide et mentale. Il est 4h30, je m’empresse de commander quelques bières et d’achever cette 22ième édition avec l'électro-jump-ravy de Noob.

A l’année prochaine !

Par Mixo
le 07/08/2010

par Tehanor
le 07/08/2010

Tags : | Dour

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2 commentaires

par Reptile (le 28/08/2010)
oui je suis d'accord sauf que c'était Beans qu'il manquait pendant Antipop, et quand je les ai vu quelques mois avant Dour ça envoyait bien.

par gp (le 10/08/2010)
Oh non je ne suis pas d'accord pour Antipop c'était un bon concert avec quelques inédits vraiment sympathiques. D'autant plus que je les avais vu quelque temps avant Dour pour un très bon concert, et je redoutais un peu la répétition mais ils se sont bien renouvelés pour ce live (malheureusement il manquait High Priest).
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