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Him + Ikuko Harada

: @ Point Éphémère - 26/01/2010



Notre compte rendu

Si Doug Scharin est impliqué dans de nombreux projets d'obédience post-rock (June of 44, Codeine, Rex, Mice Parade, Activities of Dust récemment chez nos amis d'Adluna Records, The Djinn...), c'est bien Him qui semble le noyau dur de son activité musicale. Tant par la longévité de ce projet que par ses évolutions inattendues (des voix apparaissent à partir de l'album Many in High Places Are Not Well, le dub des débuts s'éclipse, les cuivres des grands albums que sont Our Point of Departure et New Features disparaissent) et ses changements de line-up : un temps Rob Mazurek a fait partie de l'équipe, puis ce fut le tour des musiciens d'Isotope 217 et des jazzmen de la scène chicagoane affiliés à l'AACM. Cela fait deux albums que Doug Scharin s'est entouré d'une nouvelle équipe, japonaise celle-ci : on peut les entendre sur 1110 et sur le tout récent H (prononcez Hmmmmm) sorti chez Hiphiphip dans les premiers jours de 2010. Une équipe au sein de laquelle officie la chanteuse Ikuko Harada, par ailleurs voix et clavier de Clammbon, qu'on retrouvera à la fin du set et qui ouvre le concert de ce soir.

La jeune femme est seule en scène, un peu timide, debout devant un micro et un clavier qui émet des sons de synthèse qui semblent légèrement datés. Sans donner absolument dans la J-pop telle qu'on en connaît en Europe la caricature, les chansons d'Ikuko ont un côté bluette qui n'emporte pas tout à fait notre adhésion. Même si elle ouvre son set en manipulant des sons samplés qui prennent l'allure d'un curieux field recording, et même si la silhouette menue de la musicienne, seule sur scène à chanter en japonais et à s'adresser au public en français, captive l'oeil par une sorte de mystère qu'on ne comprend pas tout à fait.

Vers 21h30, c'est le Him nouvelle formule qui monte sur scène, avec deux batteurs (dont Doug Scharin), deux guitaristes, un bassiste et un clavier qui chantera également par la suite. Le meneur prend le soin de rappeler que son groupe Him n'a rien à voir avec l'homonyme métalleux, et le set démarre. Evidemment, avec les deux batteries qui usent essentiellement des cymbales et de la descente de toms, il faut peu de temps pour accrocher au groove tribal de la formation. Aucun doute possible, c'est bien le projet d'un percussionniste accompli que nous avons devant les yeux. Les deux batteurs mènent le groupe, pour ainsi dire, tambour battant : d'une pulsation à la fois savante et intuitive, régulière et fuyante. Parfois, le temps de quelques mesures, ils jouent à l'unisson, avant de se désolidariser : soit pour faire un canon rythmique (on croirait alors entendre Tortoise lorsqu'ils utilisent le delay sur la batterie), soit pour mêler deux lignes rythmiques dans un entrelacs complexe.

Autour d'eux, le bassiste appuie efficacement la double rythmique, et les deux guitaristes tissent de fines guirlandes guitaristiques qui convoquent des souvenirs de jazz, de funk, d'afro-beat ou de post-rock. Il y a dans ce jeu aéré mené à deux un équilibre remarquable de textures, de mélodies et de rythmiques répétitives. Et le clavier au look improbable (il porte aux pieds des sortes de moonboots rouge vif, impressionnants !) ajoute aux compositions des nappes synthétiques ou des sons de percussions : marimbas, gamelans, vibraphones... La musique prend le temps de se déployer, de se chercher, de se complexifier, dans des parties qui semblent à la fois très écrites et très ouvertes, libres et rigoureuses à la fois.

Quand le clavier chante, il entonne en anglais des paroles qui louchent vers le rock psychédélique ("We're up in the sky", sur Abstract Ladder) ou s'en tient à un japonais d'incantation. Comme sur disque, le groupe est puissant instrumentalement parlant, mais les parties vocales n'apportent rien d'essentiel à une musique qui, toute de rythmiques et de textures savantes, perd un peu de sa pertinence dès que le chant occupe le centre des compositions. Ainsi, les morceaux chantés par Ikuko Harada ne sont pas les plus aboutis, parce qu'ils détournent un peu cette musique de sa grande force : un équilibre parfait entre tribalisme des rythmiques et intelligence des textures, entre chatoiement mélodique et vitalité pulsatile. Même si Ikuko est très jolie, même si sa gestuelle tirée d'un art martial de dessin animé accroche le regard.

Rien dans ces parties chantées qui gâchent le plaisir d'une musique par ailleurs plus que convaincante : et cependant, ce concert confirme que, de tous les essais de la formation et de toutes ses expériences, le chant n'est pas la moins dispensable. Reste que, comme me le disent mes camarades de webzine à la fin du concert, Him est typiquement le genre de groupes à donner sa pleine mesure en live : à l'intelligence des compositions s'ajoutent l'énergie du live, la puissance quasi matérialiste du jeu collectif. Et, comme les enregistements studio sont eux-mêmes souvent de la meilleure qualité, on ne saurait trop vous conseiller d'aller voir ce sextet (parfois septet) sur scène si vous en avez l'occasion : le 27 janvier à l'Olympic de Nantes, le 28 à l'Aéronef de Lille, le 29 à la Cartonnerie de Reims et le 30 aux Trinitaires de Metz.



par Mathias
le 27/01/2010

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