La sortie d'un nouvel album d'Enablers est toujours un évènement qui ravive les braises fumantes d'un âge d'or révolu, celui de la scène post-hardcore nord-américaine des années 90 et de ses formations séminales telles que Slint, Shipping News ou encore June of 44. Plus que des cendres, c'est une flamme resplendissante que nous dévoile une fois de plus le quator de San Francisco sur ce dernier opus.
On retrouve sur The Rightful Pivot tout ce qui a fait à la fois la force et la finesse des précédents albums des californiens depuis leur End Note en 2004. En particulier ces guitares dissonantes, sinueuses et lancinantes qui forment des montagnes russes émotionnelles sur lesquelles vient se poser la voix caverneuse de Pete Simonelli. Parlés ou éructés, les spoken words de ce dernier viennent se caler sur de nombreux changements d'ambiance et on éprouve toujours le même plaisir à suivre le jeu de dualité qui s'opère entre d'un côté les compositions alambiquées du trio instrumental formé d'une batterie et de deux guitares, et de l'autre cette voix détachée du reste mais pas tant que ça.
Enablers poursuit ici la route entamée avec leurs deux précédents albums (Tundra en 2008 et Blown Realms and Stalled Explosions en 2011) tout en s'éloignant peu à peu des ambiances tamisées plus linéaires des débuts pour s'approcher du format "chanson", avec tout ce que ça implique de singulier dans le genre noise: violence retenue, cassures rythmiques, déflagrations sonores et autres décrochages. Pièce maîtresse de ce dernier album culminant à près de 10 minutes, la sublime Look synthétise à elle seule la musique d'un groupe loin d'être affaibli.
Chroniqué par
Romain
le 18/02/2015
