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Russell Haswell & PAIN JERK

: Electroacoustic Sludge Dither Transformation Smear Grind Decomposition nO!se File Exchange Mega Edit



sortie : 2014
label : Editions Mego
style : Noise / Musique électro-acoustique

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Tracklist :
01/ Russell Haswell's Mega Edit
02/ PAIN JERK's Mega Edit

A la fin des années 90, Russell Haswell fait partie des patients 0 de la musique noise sur laptop. Proche de Peter Rehberg, ce quarantenaire né à Coventry en Angleterre devient rapidement l'un des pensionnaires les plus actifs des Editions Mego, mais aussi l'un des plus discrets. Cette discrétion ou plutôt cette absence - volontaire ou non - de visibilité, le britannique la doit autant à la radicalité de ses productions qu'à leur aspect fondamentalement passe-muraille. En fait, s'il est commode d'étiqueter sa musique bruitiste et digitale sous le terme d'Extreme Computer Music, force est de constater que son rayon d'action dépasse le cadre de l'activisme noise pour s'étendre beaucoup plus loin. Musique électroacoustique, installations sonores, projets multimédia...Russell Haswell est un artiste multidisciplinaire, aussi à l'aise avec le petit monde feutré de l'art contemporain qu'au sein des milieux plus underground.

Dès son premier album Live Salvage 1997-2000 (Mego, 2001), Russell Haswell inscrit ses travaux dans une tradition de la musique noise dépolitisée, décontextualisée, qui trouve son origine à la fois dans la musique industrielle et le mouvement Power Electronic britannique. Sa proximité avec la scène harsh noise japonaise est aussi un de ses traits les plus marquants, comme le prouvent ses collaborations avec les papes de la discipline, Masami Akita aka Merzbow (sur l'ultra-violent Satanstornade, 666e référence du label Warp en 2001!) et Yasunao Tones (Convulsive Threshold, sorti chez les Editions Mego en 2011).

Néanmoins, l'utilisation du laptop et sa complicité avec Peter Rehberg le rapproche progressivement des réformateurs de la musique électroacoustique du début des années 2000, avec lesquels il partage un même penchant pour les sonorités ultra-compressées et les constructions sonores complexes, toujours au bord de la rupture. Parmi eux Florian Hecker, avec qui Haswell développera une collaboration aussi régulière que fertile, en live ou sur disques (en 2007 sur Blackest Ever Black (Electroacoustic UPIC Recording) puis en 2011 sur Kanal GENDYN). Mais aussi Carl Michael Von Hausswolff ou Mika Vainio. Des artistes sous l'influence desquels Haswell délaisse progressivement le laptop au profit du synthétiseur modulaire analogique, qui devient dès lors son arme de prédilection.

Même si l'on peut entendre sur ses productions récentes certains sons caractéristiques de la bidouille modulaire, comme les circonvolutions nébuleuses ou les nappes grosses de tension propre à la musique concrète, Russell Haswell ne s'est pas converti pour autant aux dogmes du GRM. Sa récente incursion dans la sphère de la dance music au côté de Powell, heureux patron du label Diagonal (sur 37 Minute Work out), n'a pas modéré non plus la violence qui sourde au coeur de sa musique. Dans le courant de l'année, le britannique est même revenu à ses premiers émois cyber-trash sur Electroacoustic Sludge Dither Transformation Smear Grind Decomposition nO!se File Exchange Mega Edit (excusez du peu), au côté de Kohei Gomi, aka PAIN JERK, l'une des figures les plus turbulentes de la harsh noise japonaise.

Si les deux musiciens se connaissent depuis vingt ans, leur alliance plus qu'objective n'a trouvé à se concrétiser sur scène qu'en 2012, lors d'un concert au Rammel Club de Nottingham. Electroacoustic Sludge... porte témoignage de cet évènement unique en présentant deux versons (deux mega édit) du même enregistrement: la première, longue de 73 minutes, éditée par les soins de Russell Haswell, et la seconde, plus courte de moitié, éditée par PAIN JERK. Chacun des deux musiciens a également pris la liberté d'agglomérer aux captations d'origine des sons étrangers voir même antérieurs à elles. Ainsi décontextualisé, régénéré, broyé dans une masse de sons exogènes, Electroacoustic Sludge... apparaît comme le fruit d'un concept original : proposer une relecture schizophrène du même évènement sonore en faisant s'entrechoquer deux mémoires, subjectives par nature, mais aussi deux formes d'organisation du son.

Parfois ces deux mémoires convergent au travers de signes sonores analogues (chocs métalliques, hallebardes suraiguës, hurlements électriques), mais le plus souvent, elles entrent en conflit au profit d'une plus grande atomisation du son. C'est surtout le cas chez Russell Haswell, qui grâce à des coupes franches, dissout toute notion de temps dans une linéarité systématiquement contrariée. De son côté le japonais retrouve une continuité narrative dans la polarisation maximale des moments de tension et de bruits, de relative stupeur et de déchainement.
Chez Haswell, le geste est provocateur : difficile d'endurer aussi longtemps (73 minutes!) les boules de feu, les stridences et les ruptures incessantes que celui-ci inflige au continuum sonore. Et c'est pourtant de ces motifs brutaux, qu'il parvient à tirer in extremis les évocations les plus fortes d'un dérèglement de la conscience. A contrario PAIN JERK, dont on aurait pu attendre la piste la plus aveuglément masturbatoire, ne corrobore finalement qu'à moitié nos attentes en explorant la dimension la plus cérébrale de sa musique. Au final, cet album labyrinthique, plein de densité et de contrastes, propose une expérience extrême mais non dénuée de réflexivité en révélant le rapport viral qui unit le son des deux musiciens. C'est là son atout le plus grand.



Chroniqué par Mickael B.
le 01/09/2014

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