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RougeGorgeRouge

: Froast



sortie : 2014
label : Autoproduit
style : Math-rock, post-rock

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Tracklist :
1. CHEVROTINE
2. BROCODILE
3. FRUSQUES A MANCHES
4. XMAS KIDOS
5. MA CHINA PAIN
6. DU BON FUMIER
7. PASSE POIL
8. AFREECOLOGY
9. J'ENCHARPE ENTIER

Il y a quelques années de cela, nous avions été extrêmement impressionnés par les disques d’un jeune groupe de Bordeaux, Sincabeza, qui semblait maîtriser à tel point son bréviaire du kraut-, math-, post-, j’en-passe-et-des-meilleures-rock qu’il proposait de tout cela une synthèse puissamment originale et ébouriffante d’énergie, de hargne, de vitesse, d’urgence et d’envie d’en découdre. À l’époque, en 2007, le groupe pratiquait une formule en trio, guitare, basse et batterie, sèche et formidablement efficace. Pas de chant, ni de synthés, même si trois ans plus tard, sur le split Clown Jazz avec Souvaris, des cris animaux et des synthés avaient fait leur apparition pour enrichir la matière sonore du groupe. Le temps de trois titres définitifs (au propre comme au figuré), ça explosait de partout, dans un feu d’artifice sonore et rythmique dont on se souvient encore. Et puis, comme beaucoup de groupes, ses membres ont décidé de se séparer, et on a attendu.

Après Sincabeza, David Loquier, le batteur du groupe nous a raconté qu’il a failli tout arrêter. Il a tout de même enregistré une batterie et des casseroles sur le dernier album de Guimo, avant d’entamer une pause de plus d'un an. RougeGorgeRouge est la réunion de David Loquier, Alexandre Bordage et Julien Daugieras, qui jouent respectivement dans les groupes Implore/Explore et Magneto. Les deux connaissaient Sincabeza en live, et David et Alexandre ont travaillé ensemble pour une chaîne culturelle en 2010 et 2011. C’est là que le projet est né.

Deux ans plus tard, RougeGorgeRouge sort un album autoproduit nommé Froast. Le moins qu’on puisse dire, c’est que ce titre est trompeur : au contraire, la musique de Froast est incandescente, souvent groovy, parfois brutale, et même si elle a cette qualité cérébrale et sophistiquée venue de l’héritage math-rock, elle n’a rien d’une froide soupe de cerveau. Évidemment, lorsqu’on écoute Froast après avoir aimé Sincabeza, on ne peut s’empêcher de tenter la comparaison. Mais plus on écoute l’album, plus on se dit qu’il s’agit d’une fausse piste. La musique de RougeGorgeRouge s’abreuve probablement aux mêmes sources lointaines du rock underground, mais elle s’en est davantage émancipée encore que ne l’avait fait celle de Sincabeza, peut-être grâce à la façon dont ses membres se répartissent les rôles.

Dans le groupe, Julien joue de la basse, Alexandre de la guitare et David de la batterie, mais pour tout le reste, les rôles sont interchangeables. Alexandre joue du Moog et chante sur Afreecology, tandis que Julien chante sur Chevrotine, joue de la batterie sur Xmas Kidos, des percussions, de la trompette et du piano sur J’Encharpe Entier. Il a aussi trouvé l'extrait de voix que l’on entend dans Passe Poil. Quant à David, à côté de la batterie, il joue des cloches et des claviers, chante sur Brocodile et Frusques à Manches, et s’est occupé des arrangements.

D’un titre à l’autre, leur musique varie à plaisir les modes de jeu, les atmosphères, les tempos, du lent au très véloce, du piano au fortissimo. La seule constante, c’est cette rythmique polymorphe et virtuose, qui parcourt tout le disque comme une colonne vertébrale sans cesse agitée de spasmes incontrôlables, variant les tempos, les mesures, les motifs et les figures rythmiques au sein d’un même morceau, et entraînant tout le groupe dans une sarabande de pulsations déchaînées, sauf dans les morceaux les plus midtempo du groupe (le début de J’encharpe entier, Frusques à manches).

Le reste du temps, RougeGorgeRouge pratique la guitare effilée comme une lame de rasoir, à peine diluée dans la reverb et le delay, et la basse tranchante et rythmiquement infaillible, à la fois chaloupée et droite comme un « i ». L’ensemble dessine une musique coupante et dense, anguleuse et compacte, parfois labyrinthique ; une musique qui n’arrête pas de cogner mais ménage quelques moments d’accalmie avant de relancer la machine d’un tour de manivelle. Sur certains titres, un chant répétitif s’invite (Chevrotine, Afreecology), qui relève de l’invocation ou du mantra, et parfois aussi d’autres instruments : des glockenspiels vite dissonants (Xmas Kidos), des textures synthétiques (Passe Poil, Afreecology) et même des cuivres dans l’énorme, répétitif et hypnotique finale d’obédience Kraut, le bien-nommé J’encharpe entier, qui clôt de main de maître ce disque abouti de bout en bout. La science des arrangements de RougeGorgeRouge est sèche et minimaliste mais elle fait mouche à tous les coups : elle fait de Froast le meilleur disque de franc-tireurs assimilés math-rock qu’on ait écouté depuis longtemps.



Chroniqué par Mathias
le 20/08/2014

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