Parmi les albums qu’on a ratés au moment de leurs sorties, mais qui ont réussi à se faufiler en haut de notre pile de disques en cette fin d’année 2012, figure le prodigieux album de
Get Well Soon.
Certes, on avait délibérément décider de snober la discographie de Konstantin Gropper, pour des raisons qui se voulaient parfaitement justifiées à l’époque, mais qui aujourd’hui, nous ont désormais échappé. Un tort, car l’écoute de
Scarlett Beast O Seven Heads nous signifie que nous avions commis une belle erreur à l’encontre de cet artiste.
Véritable chef-d’œuvre en matière de pop onirique et baroque ce troisième album du multi instrumentiste allemand ressuscite la musique de
The Divine Comedy et au passage montre d’étrange similitude avec le travail de cet autre homme orchestre qu’est
Neil Hannon. Ici la musique est tout aussi crépusculaire et mélancolique. Konstantin Gropper s’impose avec sa voix de crooner. Une voix élégante mais sans fioritures ni effets pyrotechniques. Car cette place est occupée avec brio par les orchestrations et les arrangements proposés par cet orfèvre. Les mélodies offrent une touche vénéneuse à l’image du
Poison signé il y a plus dix ans par un
Jay Jay Johanson, ayant atteint à cette époque le paroxysme de son savoir-faire.
En effet, les références ne cessent de défiler. On pense avec un brin d’imagination aux bandes sons des films d’Hitchcock (à l’instar de l’album de
Jay Jay Johanson nommé précédemment) pour cet art de créer les ambiances, d’hypnotiser son auditeur (
Oh my good heart), mais aussi pour distiller cette inquiétude qui apparait en filigrane. La référence avec le maître du suspens est à ce titre plus triviale, avec l’utilisation d’un extrait du film
Marnie venant clôturer l’imposant titre de clôture. Une rêverie inquiétante (on pense à
La Nuit du Chasseur), mêlant une mélodie enchanteresse inspirée par la musique des Canadiens de
The Arcade Fire et une rythmique implacable. Le tout achevant l’auditeur en beauté, après avoir joué avec ce dernier tel un chat avec une souris.
Konstantin Gropper ne change pas la face de la musique. Il ne créé pas un nouveau genre musical. Qu’importe à l’instar d’un gymnaste il arrive à tirer le meilleur de lui-même dans le cadre d’un exercice mettant en scène des figures imposées. Et à ce titre, il s’agit d’un travail de haut vol, comme l’illustrent les arrangements entremêlés de voix, cordes et cuivres animant le bien nommé titre
Disney. Une pop luxuriante, baroque et cauchemardesque, mais qui conserve voire transcende un propos des plus inspirés. Un album qui mérite des milliers de fois sa place dans la sélection de disques qui ont compté pour cette année 2012.