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J.J. Brown

: Connect The Dots



sortie : 2009
label : Well Done Entertainment
style : Hip-Hop

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Tracklist :
01/ Pure Grind (feat. Reef the Lost Cauze)
02/ That's Me
03/ The World's A Stage
04/ Froze Prose (feat. Block McCloud / Celph Titled)
05/ Gender Bender (feat. Eternia / Miz Metro)
06/ Crybaby (Punk MF) (feat. Nola Darling)
07/ Upstate Connect (fea

La chronique est parfois, même souvent – que dis-je ?, toujours un exercice périlleux. Elle exige de la part de son rédacteur la souplesse d’une gymnaste russe de 8 ans, lui imposant d’exécuter, à la demande, grands écarts sur grands écarts, de virevolter d’un album à l’autre, d’un style à son contraire, d’un univers au suivant. Votre humble serviteur a donc sorti sans plus attendre la combi totale : ballerines et tutu rose, parce que pour le coup, avec Connect The Dots de J. J. Brown, l’enjambée se chiffre en kilomètres, et le risque pour les bijoux de famille est maximal.

Mais qui peut bien avoir le courage d’assumer un patronyme aussi ringard que celui de J. J. Brown ? Le gérant d’un bar à strip-tease branché de Las Vegas intra-muros peut-être ? Ou alors un néo-mafieux, directeur d’une galerie d’art, récemment reconverti dans l’imposture picturale ? Presque…

À en croire sa bio officielle – sortez les violons et les mouchoirs – enfant, alors qu’il était encore pur et plein d’innocence (ça c’est moi qui le rajoute), le petit Brown, déjà fasciné par la musique, jouait modestement de la batterie dans une école de quartier. C’est là qu’il fit la rencontre de Dan Maier, qui devint – comme c’est attendrissant – son meilleur ami, et bientôt son associé aux dents longues. Puis le petit Brown est devenu grand. Ensemble, avec son compère de toujours, il créent 5G Productions, une maison de disques basée à Brooklyn. Leur palmarès en fait aujourd’hui pâlir plus d’un dans le métier ; ils révélèrent, pour ne citer qu’eux : Apathy, Celph Titled, The Demigodz, Majik Most, J-Zone, Poison Pen, Skitzofreniks… De quoi vous constituer un C.V. plus que raisonnable.

Fort de ce succès, il y a quelques jours à peine, notre homme annonçait à la presse, en grande pompe et à renfort de promo – ses moyens le lui permettent – ce qui ressemble à un pur délire de mégalo : son nouveau projet, Connect The Dots, en association avec Well Done Entertainment. Et je dis bien « son », puisque celui-ci ne porte ni plus ni moins que son propre nom, qui en réalité en cache une pléiade d’autres, nettement plus attrayants.

En effet, un rapide coup d’œil sur la tracklist et se déploie instantanément une pléthore d’invités de marque, tous aussi prestigieux les uns que les autres : Reef The Lost Cauze, Block McCloud, Celph Titled, la canadienne Eternia, Figures Of Speech, King Magnetic, son fidèle pote Louis Logic pour lequel il avait signé la majeure partie des productions à l’époque de The Odd Couple, le duo qu’il formait avec Jay Love, ou encore Craig G., que notre petit génie des affaires a même réussi à ressusciter. Petit coup marketing supplémentaire – s’il en fallait – chacun de ces artistes a été « croqué » par la main d’Adam Wallenta, le dessinateur du comic de Public Enemy, débauché pour l’occasion.

N’empêche que malgré ces efforts inutiles, show-business oblige, tout ceci revêt quand même l’apparence d’une triste mascarade, d’une tentaculaire connivence à l’échelle des parvenus du milieu. Et ce n’est même pas à Brown que l’on peut en vouloir, fidèle à une logique opportuniste qui a établit son succès, lui à qui on peut au moins reconnaître le talent de savoir corrompre les meilleurs. Non, c’est plutôt aux meilleurs en question que l’on en veut, eux qui se sont fourvoyés, par franche amitié, osons l’espérer pour les plus dignes, pour le généreux cachet promis à la clé pour les autres.

Pour justifier ce projet, J. J. Brown prétend jouer le pari foireux d’allier l’âge d’or du hip-hop avec sa créativité new-age, sous couvert d’une sensibilité éclectique. Sans jouer le type rétrograde rouillé d’archaïsmes, ça sent quand même la stratégie fourbe du jeune cadre fraîchement sorti d’ESC pour faire de l’œil à la fois à une cible de nostalgiques, déçus par les nouvelles sorties (nouvelles depuis 10 piges) et des auditeurs – plutôt des acheteurs – d’une génération plus juvénile, avide d’avant-gardisme, le tout sous l’étendard mensonger de « musique urbaine. »

Au final, pour qui aura conservé un tant soit peu de discernement, nous assisterons à 53 très longues minutes et 7 secondes (non moins plus longues) d’un projet sans charme ; une petite insulte – une de plus – à tous ceux qui, érigeant pourtant la qualité en véritable déité, peinent tant à se faire connaître. Mais tel est le cruel règlement institué par la société de consommation, nul n’est plus censé l’ignorer en 2009. Pour ceux qui parmi mes chers lecteurs auraient (quand même) réussi à apprécier ce CD en toc, et que cet essai pamphlétaire, à peine virulent, aurait quelque peu chatouillé, veuillez agréer mes plus sincères excuses, mais si « les goûts et les couleurs ne se discutent plus », c’est la mort de la critique.



Chroniqué par Hafi
le 30/11/2009

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2 commentaires

par Hafi (le 02/12/2009)
Bonjour ami toulousain,

Tout d'abord merci pour ton commentaire et ta confiance.

Rien ne t'empêche de juger ce disque par toi-même, mais si en effet tu es un peu allergique au bling-bling il y a peut-être une centaine de milliers d'albums à écouter avant celui-la ^^

Bonne continuation,

Cordialement.

par dokeby (le 30/11/2009)
Salut,
comme j'ai beaucoup aimé le ton de cette chronique et que je n'aime pas le bling-bling, je n'écouterai pas ce disque.
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