Qu'y a-t-il de plus glauque que d'entendre un dj qui s'emmerde ? Oui, écouter un dj vous prendre pour un con. Un sentiment qui devient hélas récurent pour la masse pléthorique de compilations et autres mix mis sur le marché dernièrement.
Trop occupés à soigner leur packaging et la communication attenante, beaucoup en oublient leurs idées et surtout leurs auditeurs, se pavanant dédaigneux avec aux bouts des doigts de pauvres agencements mécaniques, du préfabriqué sans âme.
Repéré depuis un bon moment maintenant en tant que producteur, dj et patron de label (l'excellent
Crosstown Rebels),
Damian Lazarus en amoureux de la musique, n'a pas attendu de s'ennuyer et de nous fatiguer pour se lancer de salvateurs défis. Le long format, soit
Smoke The Monster Out, son premier album en tant que tel, en est un et pas des moindres.
Portées par une maestria qui s'interdit toute exubérance, ses justes ardeurs qu'on sent passionnées, transforment ces treize titres en une expérience étrange au plus haut point, tout à la fois sensuelle, personnelle et inquiétante (à l'instar de cette pochette de disque tâchée de sang montrant une fillette à tête de panda).
Transitant sans transiger entre pop, techno et deep house,
Lazarus n'use jamais de son background de technicien expérimenté pour compliquer sa musique mais pour illustrer au contraire la vision qu'il en a. Une musique inventive et mélancolique, délicate et érudite (le morceau phare de cet opus, le (monu)mental
Moment est exemplaire à ce titre).
Alliant précision et tendresse (le magnifique instrumental de
Lullabies), esprit aventureux aussi (il fallait oser sampler le
Red Right Hand de
Nick Cave sur
Come and Play),
Damian ira jusqu'à poser sa voix sur la majorité des morceaux, les nymphettes de
Taxi Taxi! se chargeant du reste (notamment
It's Raining Today reprise
Björkienne du titre de
Scott Walker).
Surprenant de prime abord - on se souvient très bien avoir ricané sur les plus que dispensables
Diamond In The Dark et
Neverending - cette mise en danger finit par renforcer la puissance poétique et évocatrice d'un disque auquel on ne s'attendait absolument pas. Et qu'on inscrit d'ores et déjà parmi les réussites de cette d'année. Si tout ça pouvait faire école.
Chroniqué par
Yvan
le 14/06/2009