Skweee ! Skweee ! Skweeeee... Cette onomatopée n'évoquera peut être qu'un cri de goret agonisant pour la plupart d'entre nous, ou un terrible viol champêtre chez les cinéphiles. Mais l'amateur de musique électronique averti reconnaîtra là le signe de ralliement de la nouvelle scène électro scandinave.
Cadencé aux environs de 100 BPM, le skweee est une sorte de funk instrumental lo-fi à haute concentration en ondes carrées. Fusion réussie entre les délires 8-bits de geeks et la dernière prod' de
Dr Dre, le "Synthetik Skandinavian Funk" n’a pas encore fait beaucoup d’émules en dessous du 60e parallèle nord. Il serait dommage de le bouder pour autant.
Deux labels sont à l’origine du mouvement :
Flogsta Danshall, en Suède, et
Harmönia en Finlande. Leur production se limitait aux compiles et vinyls 7'' jusqu'à ce que
Flogsta Danshall décide enfin de sortir le premier LP du genre ; premier si l'on veut bien faire abstraction de l’album d’
Eero Johannes, sorti en 2008, dont la signature chez
Planet µ a largement contribué à sa reconnaissance.
C’est donc à
Daniel Savio, a.k.a
Kool DJ Dust, que revient la lourde tâche du passer au long format. Après une intro plus démonstrative que mélodieuse, on entre dans le vif du sujet.
Ohhh ! consiste en un ensemble de basses rondes et sexy (comprenez sans distorsion ni ultra-compression) servant d’écrin à des bribes de mélodies enchâssées les unes dans les autres, pour un résultat hétéroclite mais cohérent. Les morceaux s’enchaînent harmonieusement, parfois sans rupture ; on sent que l'album n'a pas été pensé seulement comme un vulgaire patchwork.
Eyeballs On The Street et
Machine Against Rage (!) maintiennent le niveau. Les pistes sont courtes mais fourmillent d’idées et de trouvailles habilement mises en valeurs.
Monkey Pee Monkey Poo (décidément, les titres sont vraiment gratinés) et
Pulguita sonnent peut être un peu plus quelconque, mais on ne s’ennuie pas pour autant. Le ton se fait même menaçant sur
Fraud, composition pour percussions analogiques couplée d'une wobble-bass. Sur
Diamond Sutra, on garde les percussions mais on change radicalement d’ambiance. Les plus nostalgiques d'entre nous devraient apprécier cette petite comptine 8-bits. Le LP se clôt sur un "hommage" (en français dans le texte) calme et posé.
Dirty Bomb laissait craindre l'étalage pyrotechnique ou le concours de bruitage à base d’Amiga et de vielles consoles, au lieu de quoi l'album s'avère être dense et homogène.
Daniel Savio offre au skweee une belle occasion de franchir ses frontières traditionnelles. Fuyant l'ennui, refusant toute agressivité, il se distingue par son honnêteté et son sens de la mélodie. On en redemande.
Chroniqué par
Runciter
le 11/05/2009
