On aurait pu essayer de disserter sur la place de ce mot hindi -
Soukha - au fronton de cet album , trouver les perspectives qui auraient pu rapprocher le nom de son mystérieux créateur
Hku - prononcez Haïku - et la poésie évanescente qui flotte autour de ses compositions. Seulement voilà, ensorcelé par les charmes capiteux de ce premier opus, on s'est laissé enivrer par ce qui ressemble grandement à un beau bouquet d'états d'âmes (le si mélancolique
J'aurais voulu en est une composante des plus pregnantes).
A l'instar de ces substances qui libèrent l'imagination,
Hku est avant tout un écarquilleur de pupilles, un formeur d'images, qui derrière les effluves envapantes de morceaux downtempo (
En Quête de Sens : Soukha, ce titre !) mûris en voyage , fait souffler un vent mi-électronique mi-organique sur un monde onirique à la croisée des chemins entre Tim Burton et Sergio Leone (
La Fourmi en est assez bluffant ).
Un univers paumé quelque part à la lisière du songe éveillé (
Write The Story) et de l'alacrité vertigineuse (le Gainsbourguien
L'Histoire d'un Homme qui va jusqu'à sampler la voix du maître) où les notes irisées d'un piano ou d'une contrebasse (le magnifique et sobre final
Esperando la Proxima Vez, calé entre
Yann Tiersen et
Pascal Comelade) deviennent autant de sas béants offerts au chaos de l'inconscient.
Dj Shadow a su exceller dans ce registre, aujourd'hui on trouve
Doctor Flake parmi ces esseulés qui portent encore haut le flambeau d'une musique trip-hop et abstract de qualité. Mais tout cela reste assez disparate pour qu'on soit encore surpris puis charmé de rencontrer un artiste qui a lui aussi cette capacité d'embellir et faire fuser des arrières-salles de la mémoire toutes ces chromos qui n'appartiennent qu'à nous.
Alors au risque de sombrer dans les poncifs, on peut tout de même renchérir en faisant de
Soukha , un de ces albums importants parce que capable de parler autant à l'âme qu'à son reflet, nos yeux en somme.
Et qui sait, peut-être doit-on s'attendre à ce que le savoir-faire du Monsieur soit un de ces quatre matins sollicité par le cinéma. Quelle manne se serait de pouvoir voir et entendre s'accoler ses talents de mise en scène orchestrale aux discours esthéthiques d'un(e) cinéaste avide de sonorités expressives (Mann ? Wenders ?).
Mais bon, avant d'extrapoler, reste à bien profiter de ces sept titres sans faille. Et attendre la prochaine fois.
Chroniqué par
Yvan
le 19/07/2007