En 2004 Matthew Herbert eut une bonne idée : sortir sur son label
Soundslike le deuxième album d'Andrew Brooks alias
Brooks (un pseudo simple qui cache une fourmilière d'idées) intitulé
Red Tape. Brooks est l'auteur de plusieurs maxis, d'un précédent album dans une veine house plutôt classique (
You, Me & Us) et d'innombrables remixes. Ce
Red Tape est quant à lui un disque bric-à-brac, un éloge à la folie créatrice où se mèlent electronica sulfureuse, pop sexy et datafunk, dans lequel son auteur déclare son “Coming Out” (oui,oui !) avec une originalité touchante.
Dans cet album,
Brooks nous montre qu'il est un conteur hors-pair en nous plongant dans des histoires dont on rêve en cachette. Dans ces histoires on croise Prince en humanoïde échappé d'un monde retro-futuriste (
Restoration), ou bien Depeche Mode dans un futur post-apolyptique roulant sur l'autoroute de non retour dans un morceau new-wave industriel (
Roxxy) où les machines s'emballent et les lasers fusent. Puis sans que l'on s'en rende compte
Brooks nous fait partager les parfums du Moyen-Orient par des ritournelles enchanteresses (
Bedbugs) et autres arpèges folkloriques.
Et si tout cela ne nous gêne à aucun moment c'est qu'il a l'art d'imposer sa touche de suite, de poser ses codes dans notre subconscient tout en douceur et fermeté à la fois. Dès le premier morceau (
Accidents) nous sommes par exemple enivrés par cette fusion des genres, par ce cocktail exotique au groove tribal et sexuel.
Brooks aime ainsi nous catapulter là où il veut, que ce soit dans un vaisseau spatial lors d'une soirée techno marsienne (
Bruning Bux) ou bien dans un piano bar de l'année 2040 avec le fabuleux morceau electro-soul
A Little Bit of Time en compagnie d'Antony Hegarty des
Antony and The Johnsons. Il s'amuse aussi à detourner les genres en infectant la house d'un funk mutant et crasseux mais terriblement érotique (
Do the Math).
L'album se clôt en contraste et douceur groovy par un voyage dans le passé empreint de nostalgie et d'un certain mystère (
Red Tape) qui se termine par un son de cor nous éveillant de ce rêve sensuel et fantaisiste.
Avec
Red Tape ,
Brooks réussit un album où se mêlent parfaitement le funk, la house ou même les musiques folkloriques, réunies dans une expérimentation electonica technoïsante mais toujours dans un esprit pop décalé où la mélancolie pointe parfois le bout son nez malgré l'extravagance de cette musique. Les machines et les circuits informatiques rendent alors possible un fabuleux voyage dans l'esprit extraverti d'Andrew Brooks.Folie ou rêverie ? Ni l'un ni l'autre mais les deux à la fois, caractéristique d'un grand album.
Chroniqué par
Paul
le 22/01/2007