Lorsqu'un premier album sort sur le label
Sub Pop, quand bien même le nom du groupe qui en est l'auteur n'était jamais parvenu à leurs oreilles auparavant, les amateurs de pop/rock indépendant ne peuvent qu'en concevoir une certaine attente. Il faut dire que cet ancien étendard grunge s'est particulièrement illustré en la matière au cours des dernières années, état de fait que l'on peut facilement illustrer par quelques exemples pris parmi tant d'autres : le
Chutes Too Narrow de
The Shins, le
Give Up de
The Postal Service ou encore le
Apologies to the Queen Mary de
Wolf Parade. Dernier poulain en date de la fameuse écurie de Seattle,
Band of Horses perpétue relativement bien cette lignée de l'excellence.
Relativement bien seulement, car les différentes comparaisons que l'on peut opérer entre ce nouveau duo (Ben Bridwell et Mat Brooke, anciens membres de
Carissa's Wierd) et d'autres groupes lui servant (un peu trop) clairement l'influences ne sont pas vraiment à son avantage. On pourra ainsi, en particulier, trouver le
Z de
My Morning Jacket (sorti il y a quelques mois) plus abouti dans un registre similaire : une musique mariant les racines nord-américaines les plus profondes (comprendre « grands espaces et rusticité ») à une orfèvrerie mélodique typiquement pop. En outre, sur ce dernier point, leur compagnon de label
The Shins nous semble encore un bon cran au-dessus.
Une fois ces réserves émises, ne boudons tout de même pas notre plaisir. Le potentiel de ce groupe est bien réel, et il jaillit d'ailleurs pleinement en plusieurs occasions. Lorsqu'ils lâchent les chevaux, notamment sur
Wicked Gil et
Weed Party, nos deux compères montrent qu'ils savent prendre fermement l'auditeur par la main pour l'emmener avec eux dans un galop musical effréné. Et quand ils décident plutôt de jouer sur la contemplation (celle du magnifique décor représenté sur la pochette du disque, par exemple, dont le caractère presque surnaturel se matérialise musicalement parlant par une réverbération parfois poussée à l'extrême), on obtient de petites perles mélancoliques telles que
Part One ou
St Augustine.
En fait, il manque surtout à cet album deux ou trois très grands morceaux pour séduire totalement. Du genre de ceux dont la magnificence reste inexpliquée, à moins d'avoir recours à ces bonnes vieilles notions de l'évidence inexplicable, de l'alchimie miraculeuse. Ceux qui ont un « truc » (on ne saurait employer un terme plus précis) qui touche de façon irrémédiable et définitive. A vrai dire, on ne parvient toujours pas à déterminer ce qui manque à
The Funeral pour rentrer dans cette catégorie. De l'intensité ? Les envolées successives qui rythment le morceau en regorgent. Du lyrisme ? Les mots chantés par Bridwell en transpirent pourtant.
Au final,
Everything All the Time est un disque qui s'écoute avec plaisir. Les amateurs d'americana et/ou de dream pop y trouveront leur compte ; et les auditeurs en quête de nouveaux groupes prometteurs ne manqueront pas de noter le nom de ces musiciens équestres. Il ne reste plus qu'à espérer d'eux qu'ils franchissent une haie supplémentaire, en sortant un deuxième album à la personnalité plus affirmée et avec un petit soupçon de magie en plus.
Chroniqué par
Grégory
le 18/07/2006