En s’associant dans le tricéphale
Meursault, on aurait pu croire que le percussionniste
Christian Wolfarth, le contrebassiste
Christian Weber et le guitariste
Tomas Korber, tous praticiens de l’électronique par ailleurs, étofferaient au cube une musique qu’ils pratiquent, chacun de leur côté, avec un art singulier de la raréfaction. Il n’en est rien et cet album de
Meursault joue peut-être plus encore cet évidement, dans les deux derniers titres surtout.
Musique âpre, donc, mais qui ne doit décourager personne, tant sa rigueur la rend belle. Ici, guitares, percussions et contrebasse sont toujours intégralement retraitées par des machines qui créent la confusion des sources, le son des cordes réduit à un mince filet granuleux. Dans le morceau central, les percussions se réduisent à des sortes de vagues basses (ou de basses vagues), de pulsations graves, diluées. Le morceau de clôture joue davantage le jeu du fragment, opposant un contrepoint au continuum sonore du premier morceau, et propose des percussions arythmiques, cliquetis, micro-nappes, structures sonores périodiques et non identifiées, manière de varier les approches, les perspectives et les pratiques pour maintenir une tension, attiser un désir d’écoute.
Chez
Meursault, tout semble se jouer en surface, tant l’ensemble des sons alliés en une même trame opacifie et soustrait toute profondeur à l’effort de percée que pourrait fournir l’auditeur. Ecouter
Meursault, c’est surtout rester disponible aux variations imprévisibles d’une musique ondulatoire, bruitiste
a minima ou délicatement bruitiste (le bruitisme, quand il apparaît, le fait toujours sur un mode doux, caressant : un paradoxe de plus pour cette musique « à surprises »).
Un exercice de rigueur sonique, à trois, dont l’intériorité impressionne.
Chroniqué par
Mathias
le 28/04/2006
