La difficulté de la musique électro-acoustique, c’est toujours d’inventer un son dont on dérobe l’origine à l’auditeur ou dont on interdit la connaissance de l’origine. Inventer un son d’origine inconnue, donc, et nécessairement, à la racine de ce son, une origine elle-même nouvelle. C’est ce que tente
Pech de manière épurée.
L’origine inconnue, ici, ce sont les instruments à cordes et les percussion joués par
Michael Vorfeld, le piano préparé et l’
inside piano de
Reinhold Friedl (c'est ce qu'indiquent le snotes de pochettes et pour le coup, me voilà face à quelque chose que je ne saurais trop expliquer). Et l’enjeu est bien de produire une matière sonore, un continuum concret de sonorités complexes : sur
Pech, les cordes produisent une trame compacte et microtonale à la fois évolutive et immobile, que quelques gongs viennent trouer ça et là ; sur
Keks, les percussions et le piano préparé ont la part belle et produisent la plus belle réussite de cet album, une trame désarticulée et arythmiques de sonorités qui, comme chez
John Cage, valent pour elles-même tout en recherchant l’harmonie du tout ;
Torf enfin retrouve la manière de
Pech sans aboutir à une franche réussite.
Au contraire des surprises offertes par
Keks, la musique proposée sur
Torf et
Pech péche (pardon) par excès d’immobilisme et de répétition, de cérébralité aussi : partant d’un axiome de composition à peu près identique au
Twenty Two Minutes for Electric Guitar de
Keith Fullerton Whitman,
Torf et
Pech oublient quelque peu en route l’intensité, l’électricité ou l’émotion qui rendent si belle et profonde la pièce de
Whitman. Qu’à cela ne tienne,
Keks offre un beau morceau de musique post-cagienne avec laquelle on pourra se satisfaire en dépit des deux autres volets.
Chroniqué par
Mathias
le 16/04/2006