Territorium ne jouera pas le jeu de l’œuvre hermétique et dévoilera toute de suite la topographie de ses ambitions : tracer une carte, incomplète et fragmentaire, du field recording et de l’ambient. En associant cinq artistes et six compositions.
Projet doublement géographique puisque, si le disque dans son ensemble dévoile une géographie engagée du genre, chaque morceau est la géographie anomale et reconstruite d’un lieu, d’un type de terrain, d’une ville, d’un climat.
Richard Garet enregistre en Amérique du Sud, dans les rues et le métro de NYC avant de monter le tout dans son studio.
Jos Smolders préfère capter les rapports d’intensité du vent, comme si la musique pouvait disparaître devant le souffle tout en faisant subsister quelques sonorités de cloches parasites, quelques fragments mutins, tandis que
Dale Loyd enchâsse d’infimes éléments captés à l’extérieur dans une ample texture électronique évoluant organiquement, en surface comme en profondeur. Quatre artistes aux pratiques différentes, mais placées dans une perspective commune qui est aussi celle du field recording à l’heure actuelle : poétiser l’espace plutôt que le documenter (le maître mot du genre, en quelque sorte), mettre au jour le génie du lieu.
Eloge de l’arythmie,
Territorium est le disque des grands déserts blancs : situés nulle part, créant son hors lieu et son hors temps au fil de la musique, les six compositions moins enchaînées que fondues les unes dans les autres redessinent un monde d’où le tumulte a été supprimé. Le field recording devient moins une ouverture à l’extérieur qu’une manière, pour chacun des compositeurs, de rentrer en soi-même en se mettant à l’écoute du monde. D’où la grande beauté du résultat, méditatif et plein d’une souveraine confiance en ses options. Chaudement recommandé.
Chroniqué par
Mathias
le 04/02/2006
