Aperçu aux côtés de
Roscoe Mitchell,
Misha Mengelberg ou
Steve Lacy, le clarinettiste et saxophoniste hollandais
Ab Baars a depuis longtemps décidé comme eux de défendre la musique improvisée autant que la musique écrite. Dernier ouvrage en date en faveur de cette dernière,
Kinda Dukish, qui extrait une dizaine de standards du songbook de
Duke Ellington pour adresser un hommage différent au monument.
Différent parce que gardant une distance de courtoisie avec les pièces du maître -
Baars osant à peine reprendre leurs noms d’origine pour intituler ses reprises. Les intentions une fois mises à plat, le trio que le clarinettiste forme depuis une quinzaine d’années avec le contrebassiste
Wilbert de Joode et le batteur
Martin van Duynhoven peut, avec l’aide du tromboniste
Joost Buis, se mettre à l’œuvre.
Alternant les morceaux de swing irréprochable (tenté par la déconstruction sur
Kinda Bear ou imperturbable sur
Kinda Perdido), les réécritures fantasques (valse saccadée pour
Kinda Gentle, pose velléitaire pour
Kinda Lafitte) et les bouleversements passagers d’un free savant (
Kinda Solitude,
Kinda Prelude), le groupe maintient sans faiblir une vitesse de croisière judicieuse.
Domestiquée, l’improvisation incorpore la conduite des interprétations, et inocule souvent une inventivité bienfaitrice à l’ensemble. La méthode est prouvée, qui sait gérer l’entente entre respect du thème écrit et bienveillance vis-à-vis de l’instinct apparu soudain, et fait mouche une fois encore. Si loin, si proche,
Kinda Dukish. Ou la relecture fidèle et dégagée d’un patrimoine universel par 4 musiciens en verve.
Chroniqué par
Grisli
le 17/01/2006