Sur
The Compass, Log and Lead,
Fred Frith s’engage sur la voie de l’improvisation savante, usant de l’interaction d’instruments de bois et de traitements électroniques. Et dresse auprès de
Carla Kihlstedt et
Stevie Wishart une musique nouvelle puisant sa force dans le monde ancien.
Allant chercher loin les instruments à intervenir,
Frith privilégie les cordes et les orgues en tous genres. Au son des attaques qu’il porte à sa guitare, il ouvre l’album sur le mode des transports et suit la route tracée par des fureteurs de la trempe de
Micus ou
Brahem, avant d’atteindre déjà les portes de l’Inde, sur un simili raga porté par les larsens électroniques de
Wishart (
A Beautiful Thing to Forget).
Si l’improvisation peut être plus déconstruite, jouant des interférences et des intentions d’échapper à toute règle (
Look at Sky Go,
Abstract Expressionism), le trio se met parfois d’accord dès le départ sur les épreuves à rendre : étude minutieuse d’un agrégat de cordes (
I Am Buffalo Bill Today), défense des propositions répétitives du violon de
Kihlstedt sur les nappes de l’orgue à manivelle (
Postcard from the Back), ou invention sur l’instant d’un folk inédit (
Aller retour).
Sans rien laisser paraître du mouvement nécessaire, le trio conduit la couleur de l’ensemble vers d’autres parterres, voire d’autres époques : Espagne d’
Aranjuez sur
Initially This ou Chine révélée aux soupirs trois fois rendus des violons (
Dog-Eared), morceaux d’une connaissance aujourd’hui universelle, absorbée et digérée sans même y prendre garde, au point d’y instiller un peu de blues sur une rythmique de vieux roulements en marche (
I Am Map).
Car la mécanique aussi joue ici un rôle important. Celle d’une vielle à roue emportant quelques cordes dans les parties sombres de sa structure (
Initially This), ou celle décidant de fioritures métalliques à poser sur la corde vibrante de
Time Goes Largo, conclusion copiant ses méthodes sur le premier titre de l’album,
Time Comes Presto, autant que stratagème venant boucler le tropique et retourner le sablier.
Chroniqué par
Grisli
le 09/01/2006