Une longue introduction du contrebassiste
Dan Seamans pose le canevas d’une version tempérée du
Pyramid Song de
Radiohead. En équilibre précaire, la batterie de
Tom Hasset tente de suivre la progression sereine du saxophone ténor de
Phillip Greenlief, avançant à pas comptés, suave jusqu’à ce que la contrebasse, cassante, le pousse à aller voir ailleurs que dans la mélodie.
Sur un clin d’œil débute
Boxcar Samovar, dernier album en date du
Lost Trio. A l’annonce du déploiement d’un
Bad plus moins vulgaire, on attend la suite, qui ne vient pas. Parce que le groupe préfère réinvestir quelques standards :
Hornin’In de
Thelonious Monk, où les légatos de
Greenlief tâchent de stabiliser les efforts de la contrebasse qui rêve de modulations violentes ;
My Little Brown Book de
Billy Strayhorn, joué jadis par
Ellington et
Coltrane ;
Jesus Maria de
Carla Bley, présenté ici avec toutes les attentions.
Respectées, les reprises ; moins propices à accueillir les passages bousculés que ne le sont les compositions originales. Ici, quelques cymbales retiennent à elles seules la construction branlante qu’est
Cruddy. Là, une danse macabre s’improvise au gré des insouciances mélodiques, chassées bientôt par un gimmick de contrebasse envoûtant la fin de
Dark Star.
Ailleurs, le trio, plus que subtil, évoque un hiver russe (
Zeemoy) de légende, tout en prouvant que le froid ne fait pas toujours l’expérience de la glace. Et le jazz, relégué depuis dix ans près des pôles, se prend au son du
Lost Trio à réévaluer ses nécessités de chaleur : issue des sons, des propositions et de l’entente.
Chroniqué par
Grisli
le 16/11/2005