« Ghost Tracks » — c’est le nom que l’on donne à ces pistes qui souvent viennent hanter la fin des albums. Pistes généralement négligeables qui, dans le meilleur des cas, témoignent d’une certaine forme d’humour, elles trompent plus l’auditeur sur la durée réelle des morceaux qu’elles ne le marquent.
Voilà pour la définition.
Mais, rien de tout cela avec les
Ghost Tracks à la
Neko. Les morceaux sont bien là ; ils ne sont pas des fantômes de pistes. Le titre n’introduit donc pas à une espèce de musique au second degré qui ne serait que réflexion sur la musique. Il vaut peut-être mieux y voir l’indice d’une certaine distance prise par rapport au monde de la musique, mais certainement pas par rapport à la musique elle-même. Dans sa musique, en effet,
Neko y est tout entier, l’investissant d’une présence qui fait que chaque instant compte.
Ghost Tracks est ainsi construit que
Synkronized-killing-machine, long de plus de treize minutes, reprend, prolonge et développe ce que les trois premiers titres ont exposé. Loin d’être redondant, il permet au contraire de concevoir dans la continuité d’une seule unité ce en quoi les membres de
Neko excellent. Au creux de l’apparente simplicité de ces lignes délicieusement aguicheuses, se lovent en fait une multitude d’idées que la séparation en morceaux de moins de cinq minutes ne permet pas d’appréhender totalement.
Cette double présentation, comme en parallèle (la somme des trois premiers titres de
Ghost Tracks est à peine supérieure à celle du seul dernier), de la musique est pourtant une grande qualité, et témoigne d’une intelligence musicale certaine. Elle permet de faire entendre de deux manières différentes un même type de musique : une fois de façon simple et une fois dans toute son étendue. Ainsi, l’efficacité étonnante de
Li-zhen trouve-t-elle son image complète dans la structure même de
Synkronized-killing-machine ; la couleur sombre de
Bliss y est elle aussi répercutée et accentuée, durant les toutes dernières minutes, par l’addition d’un sample (dont
Neko fait un usage récurrent) à la reprise électro de l’introduction. Quant à
Jukebox sa force sonore et émotionnelle montre à quel point la musique de
Neko est communicative.
Pour son deuxième EP,
Neko signe ainsi quatre titres rock qui, sachant sans en abuser s’offrir le luxe de l’electro, assurent que ce genre dont le groupe se fait le tenant — le « rock electrolux » — n’est pas une simple facétie, mais une réalité esthétique.
On en redemande et dans toute la longueur.
Chroniqué par
Jérôme Orsoni
le 04/06/2005