En relisant la chronique enthousiaste de
Songs for Someone, dernier album en date de
Perry Blake, on se dit que l’engouement fut exagéré, inversement proportionnel à la déception terrible que constitua
California, glucoserie Soul qu’on préféra vite oublier. Mea culpa. Désaveu donc de ce que l’on a écrit hier, et qui ne correspond plus à notre état d’esprit. Car pour être honnête, c’est aujourd’hui la lassitude qui l’emporte, et l’on n’attend plus malheureusement autre chose de
Perry Blake que du…
Perry Blake. A vrai dire on n’attend même plus rien du tout. Et c’est sans doute mieux ainsi, car ce n’est pas lui qui, dans la musique actuelle, semble pouvoir apporter un peu de fraîcheur à la pop.
Au moins, on ne pourra lui reprocher de ne pas demeurer fidèle à lui-même, lui qui persevère dans un classicisme qu’on aimerait dire inusable, en réalité d’arrière-garde, faute de renouvellement.
A l’heure de
The Crying Room, nouvel opus de l’Irlandais, on ne peut donc s’empêcher de considérer avec une certaine perplexité notre rapport ambigu à une musique toujours capable de beaux instants de grâce (
Forgiveness ou
These young dudes ,
I got what I wanted,
New Year’s wish), mais enfermée dans un carcan classieux anachronique, qui frôle parfois la variété mièvre. Il faut pourtant reconnaître à Perry un certain épurement sur ce disque, qui semble avoir abandonné ce decorum orchestral soul qui rendait ses derniers morceaux parfois indigestes.
Le label Naïve, qui soutenait
Perry Blake depuis
Still Life, vaque désormais ailleurs, et
Perry Blake semble bien seul. Mais on ne s'en étonne pas, car hormis Marco Sabiu, son compère depuis
California, il semble que
Perry Blake ait choisi, en artiste incompris, (la faute à qui?) de faire cavalier seul. Le nouvel album sort donc sur la structure Blu orchard music, qu’il a fondée, en édition limitée. Bel objet pour les fans, qui apprécieront . Mais en ce qui nous concerne,
The Crying Room est le disque d’une rupture avec un artiste drapé dans une mélancolie qui ne touche désormais que par intermittences nostalgiques (
Storms, et ce dernier titre,
Blue Sky Calling qui clôt le disque d’une très belle manière.)
Vous l’aurez compris, ce n’est pas tant ce
Crying Room qui est en cause (
Perry Blake n’a pas perdu son talent, pour peu qu’on soit un peu sensible à ce type d’orfèvrerie pop), que la démarche d’un musicien qui, faute de nous surpendre, ne suscite désormais qu’un intérêt désabusé.
Chroniqué par
Imogen
le 03/06/2005