Depuis 1998,
Joe McPhee,
Dominic Duval et
Jay Rosen se retrouvent de temps à autre au sein du
Trio-X et enregistrent ensemble des disques-étalon. Qu’il s’agisse des manières inédites de faire avec un jeu de références musicales assimilées, des méthodes à adopter pour mener au mieux l’improvisation en trio ou d’un refus opiniâtre de la redite, chaque nouvel enregistrement du
Trio-X mesure et jalonne.
Avec
The Sugar Hill Suite, les musiciens rendent hommage à Harlem, place de choix dans l’histoire du jazz, évidence qu’ils souhaiteraient voir se pérenniser. Incorporant des phases de jeu improvisé dans l’interprétation de standards, le trio parvient à évoquer de manière originale des artères à angles droits emplies de musique. De celle, insouciante, émanant du Cotton Club (
Drop Me off in Harlem), à celle de standards de jazz d’inspiration traditionnelle (
Sometime I Feel Like a Motherless Child).
Adepte de l’oxymore en musique,
Joe McPhee défend ici subtilement son point de vue : son saxophone cite
Freddie Hubbard avant de rendre des phrases atteintes par la rage (
Little Sunflower) ou, au contraire, transforme une complainte urbaine que l’on n’ose que bien tard en rengaine optimiste (
Goin’Home).
Le plus souvent discret, accentuant aux moments opportuns le jeu de ses partenaires,
Jay Rosen propose parfois d’aller voir ailleurs. Installant sur
Triple Play (For Jillian, Grace, & Dominic) un rythme funk minimaliste, il ouvre
The Sugar Hill Suite (For Samuel Rosen) aux moyens d’une batterie psychédélique jouant des résonances, avant de lui accorder un solo fleuri à la fin duquel
McPhee peut s’accorder toutes les permissions.
Subissant l’assaut de découpages arbitraires et efficaces, les improvisations du
Trio-X sont autant de tentatives assemblées, où se bousculent les modulations de
McPhee, le soutien fidèle des harmoniques de
Duval, et les confirmations percutantes de
Rosen. Le matériau est malléable, et l’on créé au moment même où l’on façonne. Le résultat est une nouvelle échelle de valeurs, à la palette élargie.
Chroniqué par
Grisli
le 14/02/2005