Si la scène hip hop voit tous les jours émerger de nouveaux artistes se revendiquant « undaground » et « à contre-courant », peu d’entre eux peuvent se vanter de briser les schèmes et de revisiter avec une telle fougue créatrice le rap actuel, tel que que
Donkishot, « cyberapeur » d’un improbable futur, le fait …
Bien décidé à tout démonter, dans la forme (cette façon de rapper en étirant les mots à outrance, le flow lent et saccadé, les textes parfaitement compréhensibles dès la première écoute …) comme dans le fond (ode au téléchargement et refus de céder au circuit et organes officiels de promotion – distribution du disque, refus affiché et énoncé de la défonce sous quelque forme que ce soit, thèmes abordés …),
Donkishot évoque
Léo Ferré, le blues et le free-jazz, repeint l’univers rapologique à la sauce Dada, tirant à boulet rouge sur l’attitude sclérosée et frileuse des rappeurs et maisons de disques ou s’attachant à transformer en fougue créatrice ses expériences négatives …
Jonglant avec les mots, se jouant du beat résonnant sur des nappes d’électronique froides et minimalistes, la forme que prend le tout surprend puis accroche, donne envie d’écouter plus, d’écouter mieux pour saisir toutes les nuances de cet univers bigarré si personnel.
Donkishot ainsi armé d’une seule MPC et de sa voix s’applique et transforme en mots les images qui peuplent son imaginaire débridé, réfutant les thèmes classiques du hip hop (galère, fric, « bitches » et autres gracieusetés) au profit de confessions intimistes d’un faux calme révolté, oeuvrant sans concession dans une sphère aux principes galvaudés.
Gageons que, au-delà des clivages « c’est nul – ce type est génial », ce rappeur atypique (comparable en ce sens au versaillais
Fuzati) provoquera des réactions et ne laissera pas l’auditeur indifférent. Encore un joyeux trublion bien décidé à ne pas rentrer dans le moule … bien lui/nous en fasse !
Chroniqué par
Oropher
le 09/07/2004