Signés chez nos voisins belges de Quatermass, les deux membres de
Langage Computer distillent sur leur premier long format ce qu’il est convenu d’appeler une petite perle.
Deux membres donc, soit
John Bloug, dont c’est la première expression artistique officielle, en charge de la composition et
Dj Detect, connu pour ses prestations aux côtés de
La Caution (sur leur premier album
Asphalte Hurlante), ou avec Orgasmic (
TTC et jusqu’il y a peu le
Klub des Loosers avec
Fuzzati) et
Dj Fab (
La Caution), tous trois membres du collectif Metalcrabs, ainsi que sur les très justement renommées compilations
Projet Chaos ou
Panic Room.
A la croisée de ce que des labels tels que Warp et Anticon ont pu faire de mieux,
Langage Computer enivre l’auditeur au son d’une electronica fracturée (mais vivante) nimbée d’un hip hop fin et racé, une rencontre fructueuse de l’indolence et de la vivacité .
Loin de ces tristes productions décharnées à force de compositions absconses, le duo développe une symbiose intelligente d’armes de destruction digitales et de poésie moderne, d’attaques sonores (on pense à
Aphex Twin ou aux premiers travaux d’
Autechre) et de quiétudes musicales (
Boards of Canada). Les scratchs, omniprésents, serviront de base rythmique à un ensemble soutenu par de fragiles mélodies émaillées de breaks judicieux, les platines, au regard du reste du paysage sonore de l’album, se présentant presque comme les penchants organiques répondant aux distorsions mécaniques qui jonchent cet opus. Le minimalisme de façade qui semble soutenir ces 14 pistes se mue alors très rapidement en un délicat travail de ciselage, de juxtaposition de sons et d’atmosphères éthérées.
Le duo de défricheur sait aussi s’entourer de Mc’s de talent tels que
Hi Tekk (La Caution,
L’Armée des 12),
James Delleck (
L’Atelier,
Gravité Zéro …) et
Buck 65, chacun d’eux venant prêter flow et lyrics venus d’ailleurs pour parfaire cet univers « Lynchien » et donner vie aux peintures abstraites ainsi créées.
L’alchimie entre un hip hop ambiant sous jacent et une électronique déviante, fluide et discrète fait mouche dès les premières notes et perdure tout au long de l’album, sans s’essouffler ni tourner en rond (« ce disque ne sera pas platine mais ça n’empêche qu’on t’assassine » dixit Hi Tekk sur l’excellent
Petite créature de poche).
Beau, neuf et stimulant : tout simplement excellent.
Chroniqué par
Oropher
le 23/04/2004