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Florilège musicopathe

: #12 (troisième partie)



2017 se termine et 2018 commence sur la troisième et dernière partie de ce petit tour d'horizon des quelques disques ayant longuement ou partiellement squatté les platines. Sur ce, bonne année et meilleurs vœux à nos fidèles lecteurs ...

Tomaga - Memory in Vivo Exposure (Hands in the Dark)

Tomaga est un duo londonien formé par deux membres des excellents The Oscillation, le bassiste Tom Relleen et la batteuse Valentina Magaletti. Ce side project leur permet de s'éloigner du rock psychédélique et d'un cadre musical paradoxalement très formaté dans ses effets rétro afin d'arpenter des territoires plus modernes. En résulte ainsi depuis quelques années une poignée d'albums et mini-albums libérés de toutes contraintes, poussant le potard de l'expérimentation encore plus loin et laissant afficher un plaisir de jeu saisissant entre les deux instrumentistes. Sur ce dernier EP, Tomaga va puiser dans la musique répétitive façon Steve Reich (ces fameux congas) voire dans le krautrock et les transes percussives dans des morceaux hypnotiques, légèrement caverneux et certainement prometteurs d'un bel avenir si le duo continue de s'aventurer dans cette voie là.

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Yair Elazar Glotman - Compound (Subtext)

Les déçus du dernier album de The Necks devraient pouvoir se consoler avec ce Compound. Jamais la musique du contre-bassiste berlinois ne se sera autant rapproché du jazz avant-gardiste et si particulier des australiens. Compound est d'ailleurs structuré comme leur album Mindset, présentant deux longues compositions s'étirant sur la longueur totale d'une face de vinyle (20 minutes environ). L'album présente ainsi deux pièces massives et linéaires laissant peu de place aux respirations et aux moments de flottements que l'on retrouve sur ses albums précédents, les très beaux Études et Northern Gulfs. Negative Chambers, autre album de Yair Elazar Glotman sorti en 2017 en duo avec Mats Erlandsson, était un disque essentiellement constitué de mélodies déclinantes, en plongée incessante mais ne laissait en rien présager ce violent revirement. Sur ce cousin lointain de Mindset, l'artiste semble chercher le peu de lumière pouvant s'extirper du chaos le plus entier, un chaos produit par les résonances de son instrument et de ceux qui l'entourent tels des astres autour d'un rou noir. Derrière cette expérience radicale, Yair Elazar Glotman nous prouve qu'il reste imprévisible, et qu'il est un grand.

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Metz - Strange Peace (Sub Pop)

La noise -ou plus largement le noisy rock- se porte bien. Entre les petits nouveaux (Spectre, Ulrika Spacek), les anciens sur le retour (Quicksand, l'ex Sebadoh Jason Loewenstein), les purs et durs (Hawks, STNNNG) et ceux que j'ai déjà chroniqué ici-même (Oxbow, Protomartyr), l'année 2017 fut un sacré cru. Et Metz qui, comme son nom ne l'indique pas, vient de Toronto, vient d'enfoncer le clou avec ce qui semble être leur meilleur album à ce jour. La formule du trio reste la même et donne envie d'employer un champ lexical assez fleuri et des verbes du genre "poutrer" et "défourailler". La basse gronde, la guitare saigne, la batterie martèle, le chant vocifère et lorsqu'il se fait plus mélodique rappelle le rock des sixties comme un étrange anachronisme. Mais là où Metz tire son épingle du jeu, c'est lorsqu'il arrive à diversifier ses compositions car si Strange Peace démarre en trombe avec le trio de tête (Mess of Wires / Drained Lake / Cellophane, trois morceaux qui assomment d'entrée), la suite se démarque par quelques morceaux plus singuliers, presque obliques (Sink pour ne citer que celui-ci). Notons au passage la perfection de l'enregistrement de cet album passé en de nombreuses mains dont celles de Steve Albini. Le résultat est là, intransigeant, résolument punk et totalement déflagrateur.

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Gabriel Saloman - Movement Building (Shelter Press)

Avec les dernières œuvres conceptuelles de Felicia Atkinson et Tomoko Sauvage, c'est peu dire que le label Shelter Press nous a gâté. L'impression se confirme lorsque débarque sur le même label une compilation réunissant les trois volumes de la série Movement Building de Gabriel Saloman, ex membre du duo Yellow Swans et sculpteur sonore de renom. Initialement composées pour accompagner des représentations de danse contemporaine, ses nouvelles pièces en solitaire élargissent le spectre drone électrique plus restreint qu'on lui connaissait pour aller titiller d'autres influences et de nouveaux intruments tels les mouvements de cordes amples chères au modern classical ou encore des percussions martiales (Gagaku, 2015). Sorti en 2017, ce troisième acte est certainement le plus accompli de son auteur, une œuvre en forme de descente dans la noirceur du son, celle dont on ne revient pas totalement indemne. Les compositions se suivent, s'étirent et se tordent, laissant transparaître çà et là quelques fulgurances glaciales dans un fatras d'ondes négatives. En effet, ce volume reste sur l'échelle des températures ressenties l'un de ses plus froids, une froideur que l'on doit peut-être à ces parasites électronique (What Belong to Love) ou ces rythmiques minimales rappelant le regretté Mika Vainio (les 11 minutes tétanisantes de What Belongs to You). Noir c'est noir.

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Marcus Fischer - Loss (12k)

On peut certainement distinguer deux types de musique ambient, il y a d'une part celui des grandes pièces hautement immersives, c'est-à-dire des pièces de longueurs et de pesanteur conséquentes (citons les maîtres en la matière Stars of the Lid et l'inépuisable And Their Refinement of the Decline); puis il y a d'autre part celui des courtes échappées, sinon minimalistes, du moins plus restreintes, plus fragiles aussi, fatalement éphémères. Avec ce sublime Loss, l'américain Marcus Fischer vient de nous offrir l'un des meilleurs représentants de cette seconde catégorie, livrant sept instantanés d'ambient cotonneux où les mélodies sont des particules en suspension quelquefois parasitées par on ne sait quelle énergie, bienveillante ou néfaste. Les instruments (guitare, piano) ne sont que des anges de passage. L'album est signé sur le label 12k, maison mère de Taylor Deupree avec qui Marcus Fischer a écrit un autre sommet du genre en 2017 (Lowlands). Quand on a dit ça on a encore rien dit car il y a si peu à dire sur cette musique dont la beauté se suffit à elle même et échappe si souvent aux mots qui supposeraient la définir ou pire, l'analyser voire l'intellectualiser. Alors on s'abstiendra d'en parler trop et on s'arrêtera sur le mot merveille.



par Romain
le 27/01/2018

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